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Pierre Ndong Aboghe : « Un juge fait aujourd’hui le travail de trois ou quatre juges »

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Alors que se prépare le concours d’entrée à l’École nationale de la magistrature (ENM) prévu les 23 et 24 août 2025, le Directeur général de l’institution, Pierre Ndong Aboghe, tire la sonnette d’alarme sur le manque criant de personnel judiciaire au Gabon. Dans un entretien accordé aux médias, il défend l’organisation d’un concours exigeant et équitable, censé permettre la formation d’une nouvelle élite judiciaire.

Le déficit de magistrats et de greffiers se fait de plus en plus ressentir dans l’appareil judiciaire gabonais. Une situation que l’État tente de corriger avec l’ouverture de 300 postes – dont 200 pour les magistrats – à pourvoir à travers un concours national. En première ligne, Pierre Ndong Aboghe ne cache ni l’urgence de la situation, ni son ambition. « Nous voulons former la crème des Magistrats et des Greffiers », a-t-il martelé.

Un besoin structurel face à la pression judiciaire

Interrogé sur les objectifs du concours, le Directeur général de l’ENM évoque un constat alarmant. « Aujourd’hui, un juge fait le travail de trois ou quatre juges », a-t-il poursuivi. Une surcharge qui s’explique par l’augmentation des contentieux, la création de nouvelles juridictions, mais aussi le vieillissement des effectifs. En ce sens, la tenue régulière du concours – idéalement tous les deux ans – apparaît selon lui comme une nécessité stratégique pour garantir l’efficacité du service public de la justice. « Il faut donner de l’oxygène à l’appareil judiciaire », insiste-t-il.

Clôturé le 11 août dernier, l’enrôlement des candidatures a mobilisé des milliers de postulants. « Nous avoisinons les 5 000 dossiers », a indiqué Pierre Ndong Aboghe, précisant que la majorité des candidats sont issus de la filière des greffiers principaux, accessibles avec un baccalauréat. À l’inverse, le profil de conseiller de greffe, ouvert aux détenteurs de Master, peine à attirer. Seuls 7 ou 8 dossiers ont été reçus pour ce poste. Un désintérêt que le magistrat explique par un manque d’attractivité du statut et appelle à une réforme du niveau de recrutement.

Organisation rigoureuse et volonté de transparence

Face à l’afflux massif de dossiers, les équipes de l’ENM ont dû redoubler d’efforts, travaillant jusque tard en soirée et parfois même le week-end. Mais au-delà des défis logistiques, le Directeur général tient à garantir l’intégrité du processus.

« Il n’y aura pas de passe-droit. Aucun candidat ne sera retenu sans avoir participé aux évaluations », a-t-il affirmé. Le concours se déroulera sous la supervision d’un jury présidé par un professeur agrégé et en collaboration avec le Ministère de la Justice et celui de la Fonction publique.

Clarifications sur la limite d’âge des candidats

Réagissant à la polémique sur l’âge limite fixé à 33 ans, Pierre Ndong Aboghe rappelle que cette disposition découle de la loi n°40/2023 du 26 octobre 2023. « Nous n’avons rien inventé. La limite est légale et cohérente avec la durée de formation à l’ENM », souligne-t-il, expliquant que les lauréats, après deux ans d’études, auront atteint l’âge plafond de recrutement dans la fonction publique. Il insiste également sur le fait que la date de naissance est le seul critère pris en compte, et non l’année civile, comme certains candidats ont pu le penser.

En conclusion, le Directeur général de l’ENM rappelle que l’école ne peut être qu’un sanctuaire d’excellence. Magistrat depuis plus de 35 ans et enseignant universitaire depuis 1988, Pierre Ndong Aboghe se veut intransigeant sur les standards. « Il n’y aura pas de listes préétablies. Tout le monde a sa chance, mais seuls les meilleurs seront retenus », a-t-il martelé. Un message clair à l’endroit des postulants et de l’opinion, dans un contexte où la crédibilité de la justice gabonaise est en jeu.

Lyonnel Mbeng Essone

Rédacteur en chef adjoint, je suis diplômé en droit privé. J'ai longtemps fourbi mes armes dans les cabinets juridiques avant de me lancer dans le web journalisme. Bien que polyvalent, je me suis spécialisé sur les questions sociétés, justice, faits-divers et bien sûr actualités sportives.

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