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#LibertéDeLaPresse : pourquoi GMT a été convoqué à la DGR !

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Le mercredi 3 septembre 2025, nous nous sommes présentés à la Direction générale des Recherches (DGR) de la Gendarmerie nationale, suite à une convocation reçue la veille dans les locaux de Gabon Media Time. Deux convocations avaient été déposées : l’une à mon nom, en qualité de directeur de publication, l’autre à celui de « Casimir Mapiya », pseudonyme déclaré d’un de nos journalistes, comme l’autorise l’article 45 du Code de la communication.

Accompagné de trois avocats, seul un a été autorisé à nous assister dans la salle d’audition (porte 308). Nous avons présenté notre organe de presse, une équipe de quinze jeunes professionnels, engagés, rigoureux, passionnés, et avons fait état de notre surprise d’être convoqués dans une unité spécialisée de recherche judiciaire alors que le délit de presse est dépénalisé depuis 2018 au Gabon, par l’Ordonnance n°00000012/PR/2018.

Une enquête injustifiée, prescrite et sans base légale

L’officier nous a d’abord interrogé sur le communiqué par lequel nous avions annoncé publiquement notre convocation. Nous avons rappelé que rien n’interdit à un organe de presse d’informer l’opinion sur une procédure le concernant, d’autant plus que nous avions déjà été placés en garde à vue en octobre 2023, sans justification légale, pour des faits relevant uniquement du champ médiatique. L’article qui avait conduit à notre convocation questionnait le fait d’emporter de l’argent sur un théâtre de perquisition sans l’avoir consigné au procès-verbal comme le prévoit la loi.

Ensuite, l’objet de la procédure est apparu : un plaignant, chef d’un établissement d’enseignement secondaire, s’appuyant sur une note officielle du gouverneur du Haut-Ogooué, datée de janvier 2023, relative à sa suspension. Sur cette base, un document douteux, portant le logo de Gabon Media Time et un cachet d’huissier, a été présenté comme preuve de la publication d’un article sur notre site.

Or, cet article n’existe pas sur notre plateforme après recherche effectuée au cours de l’audition par un agent de la DGR, et aucune trace d’un tel contenu n’est archivé dans notre base de données. Le document présenté est un faux grossier.

Pire encore, le plaignant a lui-même reconnu avoir bien reçu la note d’information sur sa suspension, signée par le gouverneur de la province du Haut-Ogooué, des mains du préfet du département de la Lekoko. Les faits qu’il reproche à la presse sont donc avérés. Il conteste l’existence d’une note qu’il a reçue des mains d’une autorité administrative compétente. 

Dès lors, une question s’impose : Sur quoi porte exactement la plainte ? L’article incriminé n’existe pas sur Gabon Media Time. L’authenticité du document présenté est contestable. Les faits évoqués ont bien eu lieu et ont été abondamment médiatisés. 

Et même si un tel article avait existé – ce qui n’est pas le cas – l’action en diffamation serait de toute façon prescrite, puisque l’article 13 du Code de la communication dispose clairement que « les actions en diffamation ou injure par voie de presse se prescrivent par trois mois à compter de la publication de l’article querellé ». Les faits en question remontent à janvier 2023, soit près de 20 mois avant la procédure actuelle. Autrement dit, aucune poursuite ne devrait aujourd’hui être engagée.

Pour en finir avec les confusions

La procédure est conduite sur la base d’un « soit-transmis » du procureur de la République, en totale contradiction avec la dépénalisation du délit de presse. En effet, depuis 2018, aucun journaliste ne peut être poursuivi pénalement pour des écrits ou propos tenus dans l’exercice de sa fonction, sauf en cas de faits constituant une infraction pénale relevant du droit commun, ce qui n’est pas le cas ici.

Cette situation traduit un malaise institutionnel profond. Et nous devons collectivement tirer la sonnette d’alarme. Pour rappel, le Code de la communication, règle spéciale, déroge à la règle générale, tirée du Code pénal, comme le dit l’adage « specialia generalibus derogant ». 

Ce que nous demandons au gouvernement 

Face à cette insécurité juridique croissante qui déshonore l’image du pays, nous appelons le gouvernement à prendre une circulaire conjointe (Justice, Intérieur, Défense, Communication) rappelant l’état du droit positif et l’interdiction de toute poursuite pénale pour les délits de presse, notamment auprès des agents de police judiciaire, des officiers de police judiciaire, des procureurs et leurs substituts, des juges d’instruction et des tribunaux correctionnels. 

Il est temps de mettre fin à l’instrumentalisation des procédures judiciaires contre les journalistes. La dépénalisation du délit de presse n’est pas théorique. C’est une obligation juridique qui renforce notre jeune démocratie. 

Nos remerciements 

Nous tenons  à remercier nos confrères journalistes, les organisations patronales, l’Union internationale de la Presse Francophone (UPF-Gabon), ainsi que toutes celles et ceux qui, au Gabon comme à l’étranger, se sont mobilisés.

Votre soutien nous honore. Cette épreuve ne nous fera pas taire. Au contraire, elle renforce notre engagement en faveur d’une presse libre, indépendante et responsable, car comme le disait le président de la République, Brice Clotaire Oligui Nguema le 3 septembre 2023 : « N’ayez pas peur. La presse c’est le quatrième pouvoir, nous allons vous rendre vos lettres de noblesse. Faites votre travail, faites-le bien. » Et nous le faisons. Nous continuerons à le faire.

Harold Leckat Igassela

Directeur de publication Gabon Media Time

Harold Leckat

Juriste contentieux, Fondateur et Directeur de publication. "La chute n'est pas un échec. L'échec est de rester là où l'on est tombé ", Socrates

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