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Présidentielle 2025 : Peut-on bâtir un projet politique sans parti politique ?

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À l’approche de la présidentielle du 12 avril 2025, une tendance inhabituelle se dessine au Gabon : une élection dominée par des candidatures indépendantes, sans véritable structuration partisane. Cette situation alimente un débat fondamental : peut-on réellement bâtir un projet politique durable sans parti politique ? L’histoire des grandes démocraties mondiales démontre pourtant le contraire : les partis politiques restent l’ossature essentielle d’une gouvernance stable, d’une idéologie cohérente et d’un développement structuré.

Dans les grandes puissances mondiales, aucun modèle politique stable et fonctionnel ne s’est construit sans partis politiques solides. Aux États-Unis, la rivalité entre Démocrates et Républicains structure le débat public depuis plus de deux siècles. Chaque parti défend une vision claire de la société, de l’économie et des relations internationales, permettant aux électeurs d’adhérer à un projet global et non à une simple personnalité.

En France, le clivage historique entre droite et gauche a façonné la gouvernance nationale, même si ces dernières années ont vu émerger une reconfiguration du paysage politique. Toutefois, même avec la montée d’Emmanuel Macron et du parti La République en Marche, l’organisation politique reste nécessaire pour fédérer et structurer une majorité autour d’une vision cohérente du pays.

L’Angleterre, l’Allemagne, l’Italie, et même des nations en transition démocratique comme l’Afrique du Sud ou le Brésil reposent toutes sur un système où les partis sont les véritables moteurs des ambitions politiques. Même en Chine, où le système est monopartite, le Parti Communiste Chinois (PCC) demeure un réservoir de pensée et un laboratoire idéologique pour structurer la politique du pays.

Sans parti, une gouvernance basée sur les individus et non sur les idées

Le Gabon, en mettant en avant des candidatures individuelles sans appui formel de partis, risque de fragiliser sa transition démocratique. Car sans structures partisanes solides, une élection se résume à une compétition entre hommes et non à un débat sur des programmes politiques clairs.

Les partis politiques jouent un rôle central dans la structuration de la vie démocratique en garantissant une continuité idéologique et une cohérence gouvernementale. Une fois au pouvoir, un leader ne peut gouverner efficacement sans s’appuyer sur une base idéologique solide et un programme clairement défini, ce que seuls les partis peuvent assurer sur le long terme. Ils constituent également le socle de la gouvernance en mettant en place des équipes compétentes, issues d’une formation politique claire, capables d’accompagner les décisions stratégiques et d’assurer la gestion de l’État de manière organisée et efficace.

Au-delà de la gouvernance, les partis sont aussi les garants du pluralisme politique en structurant le débat démocratique et en encadrant l’opposition. Sans eux, cette dernière devient morcelée et inefficace, affaiblissant ainsi la capacité de contestation et de proposition d’alternatives crédibles. Par ailleurs, en période de crise, ils offrent une solution institutionnelle stable permettant d’éviter les dérives autoritaires ou les blocages politiques. Dans un système où les ambitions individuelles dominent, l’absence de partis structurés risque d’entraîner une instabilité institutionnelle, faute de relais politiques capables d’assurer une transition fluide et organisée du pouvoir.

Le cas gabonais est symptomatique : l’échec des partis à imposer des candidats crédibles dans cette présidentielle n’est pas un signe de maturité démocratique, mais une faiblesse structurelle qui empêche l’électorat de choisir entre des projets de société bien définis.

Harold Leckat

Juriste contentieux, Fondateur et Directeur de publication. "La chute n'est pas un échec. L'échec est de rester là où l'on est tombé ", Socrates

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