Présidentielle 2025 : des partis politiques en retrait, que des candidatures indépendantes !

Alors que la présidentielle du 12 avril 2025 approche, la liste des candidats dévoilée par le ministre de l’Intérieur, le dimanche 9 mars 2025, laisse apparaître une configuration politique pour le moins inhabituelle au Gabon. On y retrouve des figures bien connues comme Alain-Claude Bilie-By-Nze, Joseph Essingone Lapensée, Stéphane Germain Iloko Boussiengui et bien entendu Brice Clotaire Oligui Nguema, mais l’élément le plus frappant réside ailleurs : l’absence de candidatures officielles portées par les partis politiques traditionnels.
Alors que l’on aurait pu s’attendre à une compétition classique entre les forces en présence, la scène politique gabonaise semble évoluer vers un schéma hybride, où les candidatures individuelles prennent le pas sur les appareils partisans. Cette situation interroge sur le rôle et la pertinence des partis politiques dans la structuration du jeu démocratique.
Des partis politiques affaiblis ou en recomposition ?
Dans toute démocratie, les partis politiques sont censés incarner une idéologie, structurer le débat public et proposer des alternatives de gouvernance. Or, au Gabon, cette élection présidentielle met en évidence leur fragilité et leur manque d’ancrage véritable, notamment au niveau idéologique.
Depuis la transition amorcée après le coup d’État du 30 août 2023, la recomposition politique s’est faite dans une confusion certaine. Si certains partis ont affiché leur soutien à la transition, peu ont su imposer une vision claire ou proposer une véritable alternative. La conséquence est visible aujourd’hui : au lieu de candidats émanant des appareils politiques, on assiste à une personnalisation accrue du pouvoir, où des individus se présentent au suffrage en leur nom propre, reléguant les partis au second plan.
Nous assistons à une rupture dans le fonctionnement traditionnel des élections. Cette configuration laisse penser que les partis n’ont plus le poids nécessaire pour structurer l’élection et mobiliser un électorat sur des bases idéologiques solides.
Si le PDG, longtemps machine électorale du régime Bongo, semble dans l’incapacité de rebondir après la chute de son leader historique, d’autres formations comme l’Union nationale (UN), Rassemblement pour la patrie et la modernité (RPM)ou Les Démocrates (LD) ne parviennent pas non plus à s’affirmer comme des alternatives crédibles. Cette absence de leadership fort et de structuration partisane pourrait avoir des conséquences profondes sur l’avenir du débat démocratique au Gabon.
Une élection à forte dimension individuelle
Face à cette fragmentation des candidatures, il apparaît clairement que le scrutin du 12 avril 2025 reposera davantage sur des dynamiques individuelles que sur des choix idéologiques structurés. La présence de Brice Clotaire Oligui Nguema dans la course ajoute une autre complexité. En tant que chef de la transition, il bénéficie d’une position institutionnelle privilégiée, qui pourrait peser lourdement sur l’équilibre de la compétition. Face à lui, des figures comme Alain Claude Bilie-By-Nze, ancien ministre, tentent d’exister politiquement, mais avec quel projet ? Quelle vision alternative à la transition ?
L’absence de candidatures claires des partis politiques alimente également un climat de flou démocratique. Les électeurs gabonais seront-ils appelés à choisir un homme providentiel ou à adhérer à une véritable vision politique portée par un programme structuré ? Une démocratie ne peut se construire sans des partis solides et des débats d’idées clairs. Or, ce que l’on observe, c’est un effacement progressif des structures partisanes au profit d’un face-à-face entre personnalités.
Quel avenir pour les partis politiques au Gabon ?
Si cette élection marque un tournant dans la pratique politique gabonaise, elle soulève aussi des inquiétudes quant à l’avenir des partis politiques. Leur incapacité à produire des candidats forts et à s’imposer dans la campagne pourrait les rendre de plus en plus anecdotiques, accentuant la tendance vers un système où les hommes forts l’emportent sur les projets collectifs.
La présidentielle de 2025 est donc un test grandeur nature pour la démocratie gabonaise. Elle doit non seulement clarifier les rapports de force, mais aussi pousser à une réflexion sur le rôle des partis politiques. Doivent-ils se réinventer ? Faut-il en finir avec un système où les structures partisanes ne sont que des instruments d’ambition personnelle ?
Dans un contexte où le Gabon tente de se reconstruire après des décennies de pouvoir autoritaire, l’absence de partis politiques forts est une faiblesse démocratique majeure. Car sans eux, le risque est grand de voir émerger un pouvoir personnalisé, où la transition vers une démocratie pluraliste ne serait qu’un mirage.
GMT TV