Parti présidentiel : « créer, oui ; y adhérer, non », selon Fred Zehou Moussok

Alors que le débat enfle sur une possible création de parti présidentiel autour de Brice Clotaire Oligui Nguema, plusieurs voix tentent de faire valoir une lecture accommodante de la loi. Mais pour Fred Zehou Moussok, juriste et acteur politique, la lettre du droit ne laisse aucune place au doute : l’interdiction d’adhésion d’un élu indépendant à un parti politique existant est formelle et d’égale.
Créer un parti oui, adhérer non : une distinction essentielle. Dans une analyse diffusée sur les réseaux sociaux, Fred Zehou Moussok rappelle une vérité juridique trop souvent escamotée dans le tumulte des interprétations politiciennes. « Le président peut créer un parti. Ce que la loi interdit, c’est l’adhésion, en cours de mandat, à un parti déjà existant. La nuance est capitale », précise-t-il, citant l’article 82 du Code électoral, alinéa 3, issu de la loi organique n°001/2025.
Cette disposition, trop souvent réduite à une simple règle administrative, revêt en réalité une portée constitutionnelle. Et pour cause : « En droit constitutionnel gabonais, les lois organiques complètent la Constitution. Elles en ont la même valeur », insiste le juriste. Autrement dit, la prohibition inscrite dans l’article 82 ne s’applique pas seulement aux députés ou élus locaux, mais également au président de la République.
Un droit francophone fondé sur la clarté linguistique
Face aux tentatives d’interprétation plus souples – notamment en invoquant la nature particulière de la fonction présidentielle – Fred Zehou Moussok est formel : « La Constitution fixe les grands principes, mais elle renvoie aux lois organiques pour les modalités d’adhésion ou de création des partis. Prétendre que le président y échapperait, c’est tordre le cou au droit ». Et de renchérir avec une ironie acérée : « Dans l’espace francophone, le droit est écrit en français, parlé en français et enseigné en français. Avant de comprendre le droit, il faut d’abord comprendre le français. »
Pour ce juriste, le droit comparé plaide d’ailleurs en faveur de cette lecture. Dans plusieurs pays, comme en France ou au Sénégal, un élu peut créer une formation nouvelle, mais pas changer d’étiquette en cours de mandat sans conséquences. Une rigueur qui garantit la stabilité des institutions et l’égalité devant la loi.
Préserver l’État de droit et éviter les lois sur mesure
Alors que certains suggèrent déjà une révision expresse de l’article 82 pour accommoder le président, la prudence s’impose. Une telle manœuvre risquerait d’envoyer un signal dangereux : celui d’un pouvoir qui ajuste les lois à sa convenance. « La République se construit sur des principes, pas sur des intérêts conjoncturels », fait remarquer un magistrat sous anonymat.
Dans cette optique, plusieurs observateurs plaident pour un pacte de confiance : laisser se tenir les législatives, bâtir une majorité présidentielle légitime, puis réformer dans les règles, sans que cela ne paraisse taillé sur mesure pour un homme. Ce serait là un choix de sagesse républicaine.
GMT TV