Parc automobile de l’État : angle mort persistant de la rigueur budgétaire
Alors que l’exécutif appelle les citoyens à l’effort fiscal et à la discipline budgétaire, l’achat d’automobiles grand luxe pour des responsables de l’administration continue de peser lourdement sur les finances publiques. Véhicules haut de gamme, renouvellements rapides et coûts de fonctionnement élevés interrogent la cohérence du discours officiel sur la sobriété.
Dans un contexte de tensions budgétaires durables, l’État gabonais multiplie les messages de responsabilité à destination des contribuables. Hausse de certaines taxes, élargissement de l’assiette fiscale et appels à la contribution nationale sont présentés comme des leviers indispensables pour financer les priorités publiques. Pourtant, un poste de dépense demeure largement épargné par le débat : le parc automobile de l’État.
Des acquisitions coûteuses et récurrentes
Les dotations en véhicules administratifs concernent majoritairement des SUV premium, dont le prix unitaire oscille entre 60 et 100 millions de francs CFA. Ces véhicules sont renouvelés en moyenne tous les deux à trois ans, parfois au moment même où les garanties constructeurs, souvent limitées à deux ans, arrivent à expiration. À ces montants s’ajoutent les frais d’importation, d’équipement spécifique et d’immatriculation, représentant entre 5 et 10 % du coût d’achat.
À l’échelle de plusieurs centaines de véhicules affectés aux administrations centrales et déconcentrées, l’investissement initial se chiffre rapidement en dizaines de milliards de francs CFA, dans un contexte où chaque arbitrage budgétaire est pourtant présenté comme contraint.
Un coût annuel estimé à plusieurs milliards
Au-delà de l’achat, le fonctionnement du parc automobile alourdit considérablement la facture publique. Entretien et maintenance, carburant, assurances, pneus et réparations diverses portent le coût annuel d’un seul véhicule officiel entre 3 et 5 millions de francs CFA. Rapporté à l’ensemble de l’administration, le parc automobile de l’État représenterait jusqu’à 4 milliards de francs CFA par an.
À ces dépenses directes s’ajoutent des charges indirectes rarement mises en lumière : rémunération des chauffeurs, heures supplémentaires, carburant hors mission, gardiennage et logistique. Ces coûts annexes peuvent majorer la facture globale de 20 à 30 %, accentuant le décalage entre les discours de rigueur et la réalité du train de vie institutionnel.
Jean-Valentin Leyama dénonce un « mensonge d’État »
Dans ce contexte, les propos de l’acteur politique Jean-Valentin Leyama résonnent avec acuité. « Déclarer que telle taxe va financer ceci ou cela, c’est faux, c’est du mensonge d’État », affirme-t-il, rappelant qu’une fois versées au Trésor public, les recettes sont mutualisées et perdent toute affectation précise. Elles peuvent ainsi financer indistinctement véhicules administratifs, primes, frais de mission ou autres dépenses de fonctionnement.
Dès lors, la question centrale demeure : les efforts exigés des contribuables serviront-ils réellement les priorités affichées, ou continueront-ils d’alimenter un système budgétaire peu lisible, où le confort administratif conserve une place privilégiée ? Dans un contexte de transition vers une gouvernance plus responsable, la transparence sur ces dépenses apparaît plus que jamais comme un test de crédibilité de l’action publique.









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