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L’arrêté n°0685/PM du 24 décembre 2021 ou la nouvelle méconnaissance flagrante de l’ordonnancement juridique gabonais

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Tel un lézard juridique, pour reprendre une expression chère au Professeur Jean Rivero, la Cour Constitutionnelle, par sa Décision n°0043/CC du 24 décembre 2021, a fait une pirouette judiciaire en refusant de se prononcer sur l’inconstitutionnalité de certains articles de l’arrêté n°559/PM du 24 novembre 2021 soumis à son office, préférant à tort de s’arroger les prérogatives reconnues au Juge Administratif, seul Juge de la légalité des actes administratifs.

En soulevant d’office les carences constatées dans la procédure d’’édiction de l’arrêté 559 susvisé, moyens d’ordre public, le Juge Constitutionnel a refusé sciemment de statuer sur les moyens de droit ayant trait au respect de la Constitution ou pas ; en agissant ainsi, elle a botté en touche et s’est conférée le pouvoir reconnu au Juge Administratif, juge par excellence de la légalité administrative.(d’ailleurs par le passé, la ‘’ CC’’ a fait œuvre de l’imperium du législateur en prorogeant elle-même le délai de un mois, imparti pour vider le contentieux électoral, sic).
En le faisant, le Juge Constitutionnel a porté entorse aux dispositions constitutionnelles régissant les attributions notamment de l’office de la Juridiction Administrative.

En sus, vu que la CC s’est octroyée les compétences du Juge Administratif, curieusement, et ce, à l’aune de l’arrêt Ndong Obiang (Cf. les Grands Arrêts de la Jurisprudence Gabonaise, Prof Pambou Tchivounda), le Juge Constitutionnel n’a pas relevé l’absence de contreseing des autres ministres concernés par l’application de l’arrêté querellé, comme un vice de forme flagrant. Curieux, resic, pour un Juge de la légalité des actes règlementaires !!!

En somme, pour revenir à la cause de notre Tribune, celle-ci ne se veut nullement une note doctrinale au sens puriste du terme, mais un petit memento de rappel des Grands Principes de Droit, afin de mettre en exergue que l’arrêté 0685 est en principe un acte inexistant. Et ce, en la forme et au fond. Autrement dit et en français facile, l’arrêté n°0685 n’a aucune valeur juridique.

Aussi, dans le dessein d’éclairer les citoyens gabonais (plus les hommes seront éclairés, plus ils seront libres), et loin des vains débats doctrinaux en la matière, nous nous permettons de mettre en relief ce qui suit :

De l’inexistence juridique de l’arrêté querellé

A l’aune des dispositions de l’article 9 de la Loi n° 003/2020 du 11 mai 2020 fixant les mesures de prévention, de lutte et de riposte contre les catastrophes sanitaires, les textes règlementaires ont vocation uniquement et seulement qu’à déterminer les dispositions nécessaires à l’application de la présente loi.
Or, à la lumière rien que du chapeau de l’arrêté 0685, ledit arrêté fixe l’entrée en vigueur des nouvelles mesures gouvernementales de riposte et de lutte contre la propagation de la COVID-19.

En l’espèce, l’arrêté ne fixe pas les mesures d’application de la loi susmentionnée, mais crée des nouvelles dispositions de droit. En conséquence, en application des Principes Généraux du Droit, cet arrêté est illégal (nous faisons fi de l’économie sur la jurisprudence relative à la nuance entre une circulaire impérative et une circulaire interprétative, resic)…

In fine, l’article 1er de l’acte administratif débattu ne donne aucun fondement de son existence ; ce chapeau se borne de façon lacunaire à citer la loi sans énumérer la disposition qui consacre son existence juridique.
En définitive, si on interroge l’arrêt Indjendjet Gondjout, la jurisprudence administrative gabonaise reconnait la nuance entre une norme d’application et une norme impérative. L’arrêté 0685 n’est pas un texte d’application mais un texte impératif (d’où son caractère illégal).

De la méconnaissance de l’article 47 de la Loi fondamentale
A la lumière de la lettre et de l’esprit de l’article 47 de Loi fondamentale, ‘’ en dehors des cas expressément prévus par la Constitution, la loi fixe les règles concernant :
L’exercice des droits fondamentaux et devoirs des citoyens ;
Etc.

Il en résulte en bon droit que l’arrêté n°0685(simple acte administratif, au demeurant inexistant juridiquement) ne peut porter atteinte aux libertés à valeur constitutionnelle telles que la liberté d’aller et venir, etc.
A la lumière du Droit comparé, le Conseil Constitutionnel français n’a jamais admis qu’un arrêté puisse porter atteinte aux libertés publiques individuelles ou collectives à valeur constitutionnelle. En l’espèce, le Gouvernement français est passé par une loi sur le Pass Sanitaire, et envisage dans les prochains jours une loi sur le Pass Vaccinal.
Au total, l’arrêté n’est pas le corpus juridique approprié au Gabon, pour déroger aux dispositions constitutionnelles. Donc, cet arrêté est inconstitutionnel au fond et inexistant en la forme (au plan de la légalité administrative).

Du recours juridictionnel approprié

Le COPIL Citoyen ou tout autre citoyen ne devrait point attaquer l’arrêté n° 685 devant le Juge Constitutionnel. En le faisant, il y’a une reconnaissance juridique implicite dudit acte. Car, en matière de la théorie du Droit, si on attaque un acte, ce qu’il existe.

En effet, en faisant une pierre un coup, l’arrêté 685 devra être attaqué devant le Juge Administratif, pour son illégalité tout en soulevant des questions préjudicielles liées à son anti-constitutionnalité.
Ainsi, le Référé Suspension étant une procédure d’urgence qui vise notamment la sauvegarde des intérêts des administrés, non seulement l’application de l’acté querellé sera ordonné, et le jugement au fond sera assujetti à la saisine préalable de la Cour Constitutionnelle par le Juge Administratif.
En d’autres termes, ce qui est attendu du Juge Administratif à titre principal est de statuer sur la légalité administrative de l’arrêté 685, et ce, nonobstant les questions liée à la violation de certaines dispositions constitutionnelles.

En guise de conclusion, loin de nous l’idée de faire un procès d’intentions, si le citoyen se borne à saisir à nouveau le Juge Constitutionnel, ce dernier va assurément suivre le sillon posé par le Conseil Constitutionnel français, dans sa décision du 05 août 2021 relative au Pass Sanitaire (Présomption Refragable).
En saisissant en bon droit le Juge Administratif, nous mettons dos à dos les responsabilités de la Juridiction Administrative et de la Juridiction Constitutionnelle. La Justice gabonaise sera face à son destin.
Quel Nul ne puisse ignorer le Droit….

Rolly Alain Djila
Juriste Publiciste, Spécialiste en Droit et Procédures du Contentieux

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