A La UneDerniers articlesECONOMIE

Henri-Claude Oyima : «La dette du Gabon ne financera plus le train de vie de l’État»

Ecouter l'article

Face aux mises en garde de Fitch Ratings sur la trajectoire budgétaire du Gabon, Henri-Claude Oyima, ministre d’État en charge de l’Économie et des Finances, a répondu sans détour : la dette ne financera plus le train de vie de l’État. Cette clarification, hautement politique, marque la volonté du gouvernement de reprendre le contrôle du récit économique national face aux injonctions extérieures.

Quand Fitch Ratings veut dicter la rigueur, Henri Claude Oyima fixe la souveraineté. Le 3 octobre 2025, Fitch Ratings publiait un rapport alarmiste : déficit public jugé « irréaliste » à 25–27 % du PIB, dette projetée à 106 % du PIB, et doutes sur la soutenabilité budgétaire du Gabon. Trois jours plus tard, le ministre Henri-Claude Oyima a répliqué avec fermeté, affirmant que les emprunts ne financeront « ni salaires, ni charges, ni dettes », mais exclusivement les investissements productifs.

Une manière claire de réaffirmer le cap d’un endettement structurant déjà défendu par le ministre dans ses précédentes sorties. En filigrane, cette posture traduit un message fort : le Gabon entend coopérer avec les bailleurs, mais ne plus se laisser gouverner par eux.

Discipline budgétaire ou tutelle déguisée ?

La tension entre réformes nationales et orthodoxie financière internationale n’est pas nouvelle. Comme nombre de pays africains post-Covid, le Gabon subit la double pression des marchés et des agences de notation : réduire le déficit, freiner la dépense publique, maîtriser la dette. Mais cette équation oublie souvent une réalité politique : le développement ne se décrète pas depuis Washington ou Paris.

En annonçant la création d’un comité national de suivi des projets cofinancés et l’ouverture d’un compte par projet pour une traçabilité totale, Henri-Claude Oyima tente de conjuguer deux impératifs : restaurer la crédibilité budgétaire tout en protégeant la souveraineté économique. Une approche qui renoue avec la logique de “responsabilité maîtrisée” prônée par le président Brice Clotaire Oligui Nguema : bâtir une économie ouverte, mais pilotée depuis Libreville, non depuis les sièges des bailleurs.

Une bataille d’image autant que de chiffres

La réplique d’Oyima n’est pas seulement technique. Elle est politique, presque symbolique. Car dans le contexte de défiance internationale, chaque mot compte.

En déclarant que « les emprunts serviront uniquement à financer les infrastructures, l’énergie et la transformation industrielle », le ministre d’État adresse un double message : aux marchés financiers, pour leur signifier que la trajectoire de la Vᵉ République est encadrée par des réformes structurelles ; aux citoyens gabonais, pour leur rappeler que la dette n’est pas un piège, mais un levier de développement lorsqu’elle est bien orientée.

Le test de vérité à venir : crédibilité et cohérence

Le défi du gouvernement sera désormais de convertir la discipline annoncée en résultats tangibles. La maîtrise des dépenses, la digitalisation des régies financières via le SIGFiP, et la publication régulière des comptes publics seront les véritables indicateurs de confiance.

Car pour convaincre le FMI ou Fitch, le Gabon devra prouver que la transparence et la rigueur ne sont plus des promesses, mais une culture administrative.

Si Henri-Claude Oyima réussit ce pari, il ne signera pas seulement le redressement des finances publiques : il posera les jalons d’une nouvelle souveraineté économique gabonaise, celle d’un État capable de dialoguer d’égal à égal avec les bailleurs, sans renier sa vision de développement.

Morel Mondjo Mouega

Titulaire d'une Licence en droit, l'écriture et la lecture sont une passion que je mets au quotidien au profit des rédactions de Gabon Media Time depuis son lancement le 4 juillet 2016 et de GMTme depuis septembre 2019. Rédacteur en chef

Articles similaires

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

GMT TV

Bouton retour en haut de la page