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Gabon : voir ne suffit plus, il faut enfin apprendre à observer

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« Voir est un besoin, mais observer relève du talent ». Cette phrase de feu Joachin Ngali notable Obele Ossenga, prononcée un après-midi dans la brousse de la Sébé-Brikolo lors d’une partie de chasse aux pigeons, résume mieux que n’importe quel traité philosophique l’une des plus grandes faiblesses de notre pays le Gabon.

Ce jour là, feu Joachin Ngali dit : « Regarde le palétuvier. Qu’est-ce que tu vois ? ». Son neveu qui l’accompagnait répondit : « Je vois des feuilles. » Il sourit, puis répliqua : « Alors trouve le pigeon. »
C’est à ce moment qu’il expliqua : « Voir, tout le monde sait le faire. Mais observer, distinguer le pigeon du palétuvier, voilà ce qui fait la différence. »

Dans la vie, comme dans la chasse, comme dans la conduite d’un véhicule, voir ne suffit jamais. On peut voir la route, mais c’est l’observation qui empêche l’accident.
On peut voir le paysage, mais c’est l’observation qui révèle le danger, l’opportunité, ou la vérité.
Et au Gabon, c’est précisément ce qui nous manque.

Nous voyons les problèmes, mais nous n’observons pas les causes

Le peuple gabonais voit tout : les difficultés sociales, les injustices, les décisions arbitraires, la misère qui progresse, les promesses qui riment avec néant, les clans qui se disputent le pays comme un héritage personnel.

Nous voyons les faits. Mais les voyons-nous vraiment ? Observons-nous ce qui se cache derrière ? Observons-nous les mécanismes ? Les responsabilités ?
Les acteurs ? Les intérêts ?

La politique gabonaise souffre d’une maladie simple : trop de gens voient le pouvoir, mais trop peu observent la mission. Ils voient les privilèges, mais n’observent pas les sacrifices.
Ils voient la lumière des fonctions, mais n’observent pas l’ombre des responsabilités. Ils voient le fauteuil, mais n’observent pas le peuple qui souffre debout.

Une élite qui voit le pouvoir mais n’observe pas le peuple

Pendant que les Gabonais affrontent les prix, la précarité, l’instabilité professionnelle, certaines élites ne voient qu’une chose : l’ascension personnelle.

Elles voient : la voiture de fonction, le prestige, les avantages,  la proximité avec le chef. Mais elles n’observent pas : les attentes du peuple, les injustices quotidiennes, le besoin de stabilité, la quête de dignité.

Elles voient le palétuvier du pouvoir, mais pas le pigeon du devoir.
Elles voient la route, mais refusent d’observer le stop.
La conséquence est simple : le pays avance sans regarder, sans comprendre, sans anticiper — jusqu’à l’accident.

Le Gabon a besoin de dirigeants qui observent

La véritable transformation du pays ne viendra pas de ceux qui se contentent de voir. Elle viendra de ceux qui observent.
De ceux qui distinguent l’essentiel du bruit.
De ceux qui comprennent qu’un pays ne se gouverne pas avec des impressions, mais avec une perception fine du réel.

De ceux qui savent que le pouvoir n’est pas une photo, mais une mission.
Que diriger n’est pas briller, mais servir. Que gouverner n’est pas s’exhiber, mais protéger.

Le Gabon avancera lorsque ceux qui voient apprendront enfin à observer

Voir est naturel. Observer est une discipline. Et c’est cette discipline qui manque cruellement à certaines personnalités au sein de notre classe politique, à certains de nos responsables d’administrations, à certains responsables de nos institutions.

Le Gabon n’a pas seulement besoin d’yeux.
Le Gabon a besoin de clairvoyance.

Parce qu’à la fin, un pays ne tombe pas faute de gens qui voient.
Il tombe faute de gens qui observent, comprennent, et agissent pour le bien commun.

Morel Mondjo Mouega

Titulaire d'une Licence en droit, l'écriture et la lecture sont une passion que je mets au quotidien au profit des rédactions de Gabon Media Time depuis son lancement le 4 juillet 2016 et de GMTme depuis septembre 2019. Rédacteur en chef

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