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Gabon : un excédent budgétaire en 2024 qui cache une réalité déficitaire

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Le gouvernement a présenté le budget 2024 comme une réussite, avec un excédent de 564,68 milliards FCFA. À première vue, les finances publiques semblaient enfin respirer après des années de déséquilibres. Pourtant, en décortiquant les chiffres, la Cour des comptes tire une conclusion bien différente. Selon son rapport sur l’exécution des lois de finances, ce solde positif est « virtuel », car il ne reflète pas la situation réelle de la trésorerie de l’État. Le déficit de financement s’élève à 264,34 milliards FCFA, tandis que les restes à payer atteignent 336,75 milliards FCFA. En clair, l’excédent annoncé repose sur des opérations non décaissées, et non sur un surplus réel.

Dans son analyse, la Cour rappelle que la présentation d’un excédent budgétaire est censée signifier que les recettes encaissées dépassent effectivement les dépenses exécutées. Or, en 2024, cette logique ne tient pas. Les recettes totales, évaluées à 2858 milliards FCFA, n’ont pas suffi à couvrir les dépenses réelles qui s’élèvent à 2293 milliards, sans inclure les engagements non payés. La différence comptable donne l’illusion d’un équilibre, mais la trésorerie publique reste sous pression. Pour la Cour, cette approche de gestion entretient une confusion entre comptabilité et liquidités disponibles.

Le rapport souligne également que cette présentation optimiste tranche avec les réalités économiques vécues par les opérateurs nationaux. De nombreux fournisseurs de l’État attendent encore leurs paiements, et certaines administrations n’ont pas reçu l’intégralité de leurs dotations en fin d’année. Ces retards, récurrents, traduisent des difficultés structurelles dans la gestion de la dépense publique. En comparaison, l’excédent de 923,9 milliards FCFA enregistré en 2023 représentait déjà une surévaluation, mais l’écart observé en 2024 est encore plus flagrant.

La Cour recommande de revoir en profondeur la méthode de calcul et de communication des résultats budgétaires. Elle insiste sur la nécessité d’intégrer les dettes non réglées et les restes à payer dans le solde final, afin d’obtenir une image fidèle de la situation réelle. Cette transparence est indispensable pour restaurer la confiance des citoyens et des investisseurs dans la gouvernance financière du pays.

Si les chiffres peuvent donner le sentiment d’une embellie, la réalité est moins reluisante puisque l’État continue de fonctionner sur des avances de trésorerie, accumule des arriérés et reporte une partie de ses engagements. L’excédent budgétaire 2024 apparaît ainsi comme un trompe-l’œil, masquant les tensions d’un système public encore fragile et dépendant d’artifices comptables pour équilibrer ses comptes.

Karl Makemba

Engagé et passionné, Karl Makemba met son expertise et sa plume au service d’une information rigoureuse et indépendante. Fidèle à la mission de Gabon Media Time, il contribue à éclairer l’actualité gabonaise avec une analyse approfondie et un regard critique. "La liberté d'expression est la pierre angulaire de toute société libre." – Kofi Annan

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