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Gabon : prostitution 2.0, quand les «placements» deviennent un marché structuré sur WhatsApp et Facebook

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Dans un message glaçant publié le 10 juin 2025 sur Facebook, “La Préfecture du rire”, créateur de contenu en ligne, lève le voile sur une réalité insidieuse : la banalisation des “placements” au Gabon. Derrière ce mot devenu courant se cache un marché de la prostitution numérique, organisé, tarifé, et désormais banalisé, qui cible directement les jeunes filles gabonaises.

À Libreville comme à l’intérieur du pays, ce qui n’était autrefois qu’un murmure honteux est aujourd’hui devenu un système bien huilé. Des groupes fermés sur WhatsApp, Facebook ou Telegram proposent des “services” à la carte : choix de jeunes filles via un catalogue, grille tarifaire transparente, lieux de rendez-vous désignés, motels ou domiciles, et consignes logistiques. Derrière des pseudos, des administrateurs orchestrent un réseau numérique d’exploitation sexuelle à ciel ouvert, au vu et au su de tous, dans une indifférence presque générale.

Une prostitution déguisée en “placement”

« Ce mot qu’on chuchotait hier est devenu un business. Le placement est désormais institutionnalisé sur nos réseaux », alerte “La Préfecture du rire”, un producteur de contenus satiriques, qui abandonne ici l’humour pour une dénonciation brute. Le jeune homme dénonce une prostitution en ligne qui ne dit pas son nom, mais qui s’installe durablement dans les habitudes numériques de la jeunesse.

Et pour cause : “placement” est le mot-clé qui dissimule un système d’exploitation sexuel banalisé, avec ses clients réguliers, ses horaires fixes et ses profils calibrés. Les jeunes filles y sont réduites à des “produits”, parfois mineures, vendues à la nuit, au week-end, au forfait.

Une interpellation aux familles et aux autorités

Dans sa publication, le collectif ne se contente pas de dénoncer. Il s’adresse d’abord aux jeunes filles. « On vous a menti. Ton corps n’est pas un business model. Tu as le droit de rêver plus grand que des billets froissés sous un drap sale », a-t-il martelé. Puis, il interpelle frontalement les familles. « Vous applaudissez le luxe, mais refusez d’en questionner l’origine. Vous fabriquez des silences qui tuent », précise–t-il. 

Mais c’est surtout vers l’État que le cri d’alarme est lancé : où sont les régulateurs du numérique ? Les brigades de cybercriminalité pourtant prévue par la loi ? Les campagnes de prévention à l’initiative des directions générales de la famille ou de l’éducation populaire ? Aujourd’hui, les prédateurs opèrent à portée de smartphone. Et les victimes, souvent livrées à elles-mêmes, se taisent.

Le phénomène mérite plus qu’un débat : une réponse. L’inaction face à cette dérive sociétale serait une trahison collective. Car derrière chaque “placement” se cache une fille, souvent précarisée, mère ou orpheline,  qu’on abandonne à elle-même.

Henriette Lembet

Journaliste Le temps est une donnée fatale à laquelle rien ne résiste...

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