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Gabon : le système bancaire est-il prêt à encaisser le choc Oragroup ?

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Le couperet est tombé. Le 14 juin 2025, l’agence Fitch Ratings a rétrogradé Oragroup, maison-mère d’Orabank Gabon, à la note RD (Restricted Default), marquant une situation de quasi-faillite. Ce déclassement survient après le report in extremis d’un emprunt libellé en francs CFA et confirme l’état critique de la trésorerie du groupe, déjà ébranlé par l’échec de sa fusion avec Vista Bank.

Avec un résultat net déficitaire de –44,4 milliards FCFA en 2024 et une chute brutale de ses capitaux propres de 144 à 97 milliards FCFA, Oragroup s’enfonce dans une crise de solvabilité. Mais l’onde de choc dépasse la maison-mère : elle menace désormais la stabilité du système bancaire gabonais tout entier.

Orabank Gabon dans la tourmente, la confiance des clients fragilisée

Première exposée, Orabank Gabon subit de plein fouet les effets de contagion. Conflits de gouvernance, climat social tendu, rumeurs persistantes sur la solidité financière : la filiale est désormais confrontée à une dégradation de réputation qui pourrait précipiter une vague de retraits et un gel de certaines lignes de crédit.

« C’est un risque classique de défiance. En l’absence de communication claire, les clients agissent par précaution, parfois de manière irrationnelle », souligne un analyste financier. Dans un contexte d’opacité accrue, la spirale du doute pourrait rapidement transformer un choc sectoriel en crise de confiance généralisée.

Le système bancaire sous pression, la COBAC et la BEAC en alerte

La détérioration récente de la note souveraine du Gabon à CCC en janvier 2025 avait déjà renchéri l’accès aux financements internationaux. L’effondrement d’un acteur régional comme Oragroup, très impliqué dans les opérations syndiquées et les prêts interbancaires, amplifie désormais le risque de contagion à d’autres institutions : BGFIBank, UGB, Ecobank ou BSIC.

Faute d’une intervention rapide des régulateurs, le marché interbancaire pourrait se figer. La liquidité bancaire se tarirait alors, étouffant le financement de l’économie réelle, déjà ralentie par une inflation à 3,8 % et un crédit aux PME en baisse.

Quel avenir pour le modèle bancaire gabonais ?

Dans ce contexte tendu, les autorités de tutelle — COBAC, BEAC, voire les États membres — devront envisager des mesures d’urgence : stress tests renforcés, exigences de fonds propres revues à la hausse, recapitalisation d’Oragroup, voire soutien public ou régional.

Mais au-delà du cas Oragroup, une interrogation persiste : le modèle bancaire gabonais, dominé par des groupes régionaux sous-capitalisés et parfois peu transparents, est-il réellement résilient ? « Nous payons aujourd’hui l’absence de supervision active et de gouvernance rigoureuse dans certaines structures », déplore un cadre bancaire sous anonymat.

Faute de réformes structurelles, le Gabon pourrait connaître sa première crise bancaire systémique depuis deux décennies. L’avenir du secteur repose désormais sur une recapitalisation rapide, l’arrivée de nouveaux investisseurs stratégiques et le retour à une discipline prudentielle solide. Le compte à rebours est lancé.

Casimir Mapiya

« Mieux vaut une vérité qui fait mal, qu'un mensonge qui réjouit. » Proverbes berbères

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