Gabon : le RPM suspend son secrétaire exécutif adjoint critique sur l’investiture d’anciens PDGistes par l’UDB

En suspendant son secrétaire exécutif adjoint, Joyce Laffite Ntsegue, pour avoir dénoncé l’investiture d’anciens cadres du PDG par l’Union démocratique des bâtisseurs (UDB), le Rassemblement pour la patrie et la modernité (RPM) d’Alexandre Barro Chambrier envoie un signal pour le moins ambigu. À la veille des législatives, cette décision interroge sur la cohérence et l’indépendance d’un parti censé peser dans la future majorité présidentielle.
Une suspension express pour un post jugé « hors ligne ». Ce mardi 5 août 2025, un communiqué signé par Jean Robert Goulongana, président par intérim du RPM, est tombé comme un couperet : Joyce Laffite Ntsegue, secrétaire exécutif adjoint chargé de la communication et porte-parole n°2, est suspendu « à titre conservatoire » avec effet immédiat. Motif avancé : une prise de position publique, jugée « en contradiction manifeste avec la ligne définie par le président du parti ».
Dans un post Facebook publié 24 heures plus tôt, devenu viral, l’intéressé avait fustigé l’investiture par l’UDB – parti allié au RPM – de candidats issus du PDG, ex-parti au pouvoir déchut lors du coup d état du 30 août 2023. « Nous n’allons pas reconstruire le Gabon avec ceux qui l’ont détruit. Hier candidats d’Ali Bongo Ondimba, aujourd’hui candidats de Brice Clotaire Oligui Nguema… Où est l’arnaque ? », écrivait-il.
L’ombre du Dialogue national inclusif
Pour de nombreux observateurs, cette sortie rappelait un point crucial du Dialogue national inclusif : la nécessité d’un traitement politique clair vis-à-vis des figures ayant servi le système Bongo-PDG et contribué, durant cinq décennies, à la paupérisation du pays, accentuée au cours du dernier second mandat d’Ali Bongo Ondimba.
En choisissant de sanctionner son cadre, le RPM semble tourner le dos à cet esprit de rupture, privilégiant la « préservation de la cohésion » avec son allié présidentiel plutôt que la défense des aspirations exprimées par une large partie de l’opinion publique.
Alliance stratégique ou alignement forcé ?
Cette affaire soulève une question de fond : quelle marge de manœuvre conserve un parti qui sanctionne l’un de ses cadres, investi sur une circonscription qu’il devra conquérir, pour avoir exprimé une divergence politique avec un allié ?
La décision du RPM intervient alors que l’UDB, parti du président Brice Clotaire Oligui Nguema, a investi ses propres candidats, y compris sur des circonscriptions où le RPM aligne également des prétendants. De quoi interroger sur la pertinence d’une « alliance » où les intérêts électoraux semblent se chevaucher plus qu’ils ne se compléter.
Un test de crédibilité pour le RPM de Barro Chambrier
En pleine recomposition politique, cette suspension pourrait fragiliser l’image d’un RPM présenté comme l’une des forces d’appoint du futur bloc présidentiel. Entre loyauté stratégique et perte d’autonomie, Alexandre Barro Chambrier et son équipe jouent une partie à haut risque : celle de rester dans le cercle rapproché du pouvoir tout en évitant d’apparaître comme un simple satellite politique.
Dans un contexte où la Vème République promettait pluralisme et liberté de ton, la sanction contre Joyce Laffite Ntsegue pourrait bien être perçue comme un pas en arrière… et une victoire tacite pour l’orthodoxie politique que beaucoup espéraient révolue.
GMT TV