Gabon : le député Ella Engonga dépose une proposition de loi d’amnistie pour Kelly Ondo Obiang et Cie

Dans un geste fort, le député Ella Engonga Lionel a officiellement déposé une proposition de loi visant à accorder une amnistie aux militaires Kelly Ondo Obiang, Estimé Bidima Manongo et Dimitri Nze Minkom. Condamnés à 15 ans de prison en 2021 pour leur tentative de renversement du régime d’Ali Bongo, ces hommes sont aujourd’hui considérés par certains comme les précurseurs du changement politique qui a abouti au coup d’État du 30 août 2023. Leur libération est désormais présentée comme une nécessité pour parachever la réconciliation nationale.
Dans l’argumentaire qui accompagne la proposition de loi, le député Lionel Ella Engonga met en avant l’importance de l’amnistie dans la stabilisation des périodes de transition. Il cite en exemple l’amnistie générale de 1998 promulguée par Omar Bongo, qui avait permis de solder des contentieux politiques remontant aux années 1960. De même, il rappelle qu’au Burkina Faso, une « grâce amnistiante » a récemment été accordée aux militaires impliqués dans le putsch manqué de 2015, renforçant ainsi la cohésion nationale.
« La restauration de la Nation et la réconciliation des Gabonais seraient incomplètes sans cette amnistie », plaide-t-il, soulignant que ces militaires ont agi dans un contexte où l’État était fragilisé par l’incapacité manifeste du président Ali Bongo à gouverner après son AVC.
Une révolte justifiée par l’histoire récente ?
Le 7 janvier 2019, Kelly Ondo Obiang et ses compagnons avaient pris d’assaut la Maison Georges Rawiri pour appeler au renversement du régime. Cette tentative fut rapidement réprimée, et ses instigateurs arrêtés puis jugés pour atteinte à la sûreté de l’État. Mais quatre ans plus tard, ce sont des officiers supérieurs de la Garde républicaine qui ont, à leur tour, renversé Ali Bongo, confirmant ainsi le malaise profond que ces militaires avaient dénoncé dès 2019.
Aujourd’hui, la proposition d’amnistie portée par le député Ella Engonga Lionel s’appuie sur cette continuité historique. Il considère que les faits reprochés aux trois militaires ont finalement été validés par le putsch du 30 août 2023, orchestré par leurs aînés et supérieurs en grade, à la tête desquels se trouvait l’actuel président de la Transition, le général Brice Oligui Nguema.
Le président Oligui Nguema en arbitre ?
Signe d’un possible tournant, le président de la Transition lui-même a évoqué la situation de Kelly Ondo Obiang lors de son passage à Mitzic le 21 février dernier. « Kelly Ondo, c’est mon frère. Les gens qui l’ont mis en prison l’ont jugé. Pour le libérer, je dois passer par les lois… », a-t-il déclaré, ouvrant ainsi la porte à une issue légale pour ces prisonniers.
Dans cette perspective, la proposition de loi prévoit non seulement leur libération immédiate, mais aussi leur réintégration dans leurs grades et fonctions au sein des forces armées, conformément aux dispositions du Code de procédure pénale.
Un débat politique en gestation
Reste à savoir si cette proposition de loi sera adoptée par l’Assemblée nationale de la Transition et validée par le CTRI. Son adoption marquerait un pas supplémentaire vers la réconciliation nationale, mais elle pourrait également soulever des critiques, notamment sur l’idée de réhabiliter des militaires ayant tenté un putsch.
Dans un pays en pleine refondation, la question de l’amnistie de Kelly Ondo Obiang et ses compagnons pourrait bien devenir un test pour évaluer la capacité des nouvelles autorités à tourner définitivement la page du régime Bongo tout en consolidant un État de droit crédible.
GMT TV