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Gabon : derrière le bruit des casseroles, c’est le peuple qui crie sa profonde détresse

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La colère gronde dans notre pays, où les mesures sanitaires anti-Covid sont jugées trop restrictives et se heurtent désormais à l’exaspération de la majorité de la population. Au-delà de la gestion de la crise sanitaire et de ses effets, les vives tensions observées semblent être la manifestation concrète du profond climat de défiance qui s’est installé entre le peuple et ses gouvernants. 

C’est à l’unisson et au rythme des sonorités traditionnelles de leur pays que les Gabonais, armés de marmites et de louches, donnent désormais de la voix et du rythme pour crier leur ras-le-bol suite aux mesures restrictives anti-Covid. 

Sur la gestion de la crise, la position semble partagée par la majorité de la population : il y a une forte exagération de la part du gouvernement. Les Gabonais se sentent asphyxiés, totalement ostracisés, méprisés, humiliés, voire infantilisés. Les libertés, pour ce qu’il en était, sont de plus en plus restreintes au nom de la lutte contre la Covid 19 ; alors que le Gabon, selon les estimations des experts, n’est pas un pays à fort risque. Ils estiment donc qu’une gestion de la pandémie, en adéquation avec leurs réalités socio-économiques, peut-être envisagée ; plutôt que d’instaurer un état d’urgence sans fin et un climat permanent d’occupation du pays. 

Les effets des mesures gouvernementales se lisent sur les visages des Gabonais. Ils en ont marre. Il faut réajuster le quotidien au rythme des restrictions horaires, des interminables bouchons, des attroupements de tous genres, etc. Tel un automate mal programmé pour effectuer des tâches contraignantes, le Gabonais peine à s’exécuter car, il faut le signaler, entre ce qu’exige le gouvernement et la réalité sur le terrain, les carences sont criantes. L’impression laissée est que les décisions gouvernementales sont prises sans préparation, sans analyse réelle des risques et profits potentiels, sans aucune vision à moyen ou long terme. Les nombreux secteurs d’activités entièrement sinistrés, ainsi que tous ces ménages qui se retrouvent dans l’incapacité de boucler correctement les fins de mois en sont la parfaite illustration. 

« Le ras-le-bol », « trop c’est trop », « on n’en peut plus », « ces gens-là n’ont pas pitié de nous », sont les expressions qui s’échappent spontanément, sans complexe et hésitation de la bouche de nombreux compatriotes. De Libreville à Mabanda, les Gabonais sont éreintés par toutes ces mesures gouvernementales qui n’améliorent pas, mais assombrissent leur quotidien, déjà douloureusement impacté par les effets de la crise multidimensionnelle qui étrangle ce pays depuis près de 5 ans. Avant la crise, ils vivaient déjà un parcours de condamné ; la Covid est venue alourdir la sentence ! 

Ce qu’exprime la révolution des casseroles est bien plus qu’un simple exutoire des populations pour dénoncer les mesures restrictives liées à la pandémie de Covid 19. La Covid n’est en réalité que le mal de trop qui vient révéler l’existence d’un malaise social déjà bien enraciné et qui ne semble trouver aucun remède pour apaiser des douleurs et frustrations de plus en plus intenses. 

Les blessures de la crise post-électorale de 2016 n’ont jamais cicatrisé ; le fossé entre les dirigeants, totalement déconnectés, et la population n’a jamais été aussi profond ; le climat socio-politique, en apparence apaisé, a tout d’une marmite qui bouillonne. Le niveau de défiance est tel que les Gabonais ne manquent jamais l’occasion ni de créativité pour tourner en dérision chaque décision ou prise de parole officielle. 

Le mépris permanent, la répression systématique et un autoritarisme à la petite semaine ne peuvent demeurer la seule réponse du gouvernement gabonais aux revendications du corps social. 

Largement incapable d’assurer le minimum vital à un peuple qui ne demande pas grand-chose pour se satisfaire, le gouvernement gabonais n’a, pour réponse à des bruits de casseroles, que l’usage excessif de la force. Au diable, les plaintes et les cris du peuple. D’abord imposer, puis réprimer et, enfin, feindre de compatir lorsque la situation dérape. Ainsi se caractérise le modus operandi du régime établi au Gabon. 

Les douloureux évènements de la nuit du jeudi 18 février 2021 sont la parfaite illustration d’un gouvernement en proie au doute sur le bien-fondé de sa stratégie, qui doute de sa propre légitimité et qui, dès lors, se réfugie volontiers derrière la répression systématique. 

A quel moment ce régime entend-il ce qui sort des cœurs meurtris de son peuple ? Est-il à ce point indifférent aux souffrances qu’il a lui-même causées par des années de gabegie et une stratégie anti-Covid illisible et inadaptée au contexte social gabonais ?

A ce stade, et pour demeurer constant dans sa logique ultra répressive, il ne serait pas surprenant que le gouvernement envisage les bruits de casseroles comme une infraction constitutive d’atteinte à la sûreté de l’Etat. 

Gregue Nguele 

Éditorialiste

Gabon Media Time

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