Gabon : contrôles routiers, pots-de-vin et abus, le quotidien des usagers face à la police

Un Gabonais sur trois affirme avoir dû payer un pot-de-vin lors d’un simple contrôle routier. C’est l’un des enseignements de la dépêche n°1037 d’Afrobarometer, publiée le 28 août 2025. Dans un pays où la police est la première vitrine de l’État, ces pratiques quotidiennes installent une défiance durable et minent le lien entre citoyens et institutions.
35% des rencontres riment avec pots-de-vin. Selon l’enquête, 54% des Gabonais disent avoir croisé la police dans des contextes « ordinaires » — barrages, contrôles d’identité, patrouilles. Parmi eux, 35% reconnaissent avoir versé de l’argent, offert un cadeau ou rendu un service pour « éviter des ennuis ». Autrement dit, plus d’un usager sur trois estime qu’un passage devant la police équivaut à payer un droit de passage officieux.
« On ne sait jamais ce qu’ils vont demander. Parfois c’est pour une pièce oubliée, parfois pour un prétexte inventé. Mais si tu refuses, tu perds du temps ou tu finis au poste », confie un chauffeur de taxi de Libreville.
L’usager piégé entre peur et résignation
Pour les automobilistes, cette situation est devenue une norme. Les plus modestes, contraints d’emprunter les routes chaque jour, parlent de « taxe parallèle » qui ponctionne leurs maigres revenus. « Avec mes 3 000 francs de recettes par jour, si je donne 1 000 francs à un policier, je n’ai plus de quoi nourrir ma famille », témoigne un vendeur ambulant à Owendo.
Ces abus ne se limitent pas aux conducteurs. Dans certains cas, les policiers exigent de l’argent pour accélérer une procédure ou pour fermer les yeux sur une infraction mineure. Une logique qui installe un climat de peur et d’arbitraire.
Quand l’abus devient une règle du jeu
Afrobarometer souligne que 68% des citoyens considèrent « la plupart » ou « tous » les policiers comme corrompus, un score plus élevé que pour n’importe quelle autre institution. Loin de l’image de protecteurs, les agents de police apparaissent souvent comme des obstacles à franchir. « Même quand on est en règle, on a peur d’eux », lâche un étudiant rencontré à Ntoum.
Que faire face à ce quotidien ?
La réforme annoncée par le gouvernement, création d’unités spécialisées, recrutement de 1 000 agents, formation renforcée, ne suffira pas sans un changement de culture et de contrôle. Plusieurs pistes sont avancées : Multiplier les contrôles indépendants sur les barrages routiers; Mettre en place un numéro vert pour signaler anonymement les abus; Sanctionner publiquement les agents pris en flagrant délit de corruption.
Ces mesures ne relèvent pas de la théorie : elles conditionnent la restauration de la confiance entre les citoyens et leurs forces de sécurité.
GMT TV