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Elections 2025 : la tricherie comme doctrine, l’impunité comme loi ?

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Le scrutin du 27 septembre 2025 devait consacrer le renouveau démocratique gabonais. Il a accouché d’une farce électorale à ciel ouvert. Une tricherie à peine déguisée, massive, systématique, dont les acteurs – de tous bords – s’échinent à détourner le regard, quand ils n’en sont pas les complices ou les architectes. Pourtant, les témoignages abondent, les protestations se multiplient, les preuves s’amoncellent. Et avec elles, une exigence : que justice soit faite, que les auteurs soient poursuivis, et que leur inéligibilité soit prononcée.

Des élections bâclées, un peuple bafoué. Les signaux d’alerte étaient nombreux : dérogations arbitraires, listes électorales bricolées, bulletins manquants, bureaux ouverts jusqu’à l’aube, urnes introuvables, candidatures annulées à l’insu des intéressés. À Akanda, Jean Gaspard Ntoutoume Ayi dénonce une falsification « ignoble », où les procès-verbaux affichés n’ont plus rien à voir avec les résultats proclamés. À Oyem, Estelle Ondo réclame une annulation pure et simple. À Moanda, Jean Valentin Leyama parle d’un duel entre « Ebola et Covid ». À Port-Gentil, Mike Jocktane crie à la « pagaille organisée ». À Libreville, Apendò Ndifo documente une « forfaiture électorale » de grande ampleur.

Le plus accablant ? Cette convergence inédite des voix : anciens Premiers ministres, membres de la majorité, figures de l’opposition, candidats recalés ou humiliés, électeurs indignés. Tous s’accordent sur un constat : ce scrutin n’a pas été sincère.

De l’impasse morale à la faillite républicaine

On croyait avoir touché le fond avec les scrutins de l’ère Bongo. Le régime de la Transition promettait la rupture. Mais les faits sont têtus : avant = aujourd’hui = demain. Le coup d’État du 30 août 2023 avait été justifié par un simulacre électoral. Mais ce 27 septembre 2025, c’est un remake, avec les mêmes vices, les mêmes stratégies, les mêmes silences gênés. La CNOCER est accusée d’illégalité et d’incompétence. Le ministère de l’Intérieur se défend en évoquant des recours… que les candidats ignorent. Des candidats découvrent le jour même qu’ils ne sont plus en lice. On triche dans les listes, dans les urnes, dans les résultats.

Comme le dit crûment Chamberland Moukouama, acteur public : « Nous aimons tricher. » Et Julien Nkoghe Bekale, pourtant cadre du PDG, d’ajouter : « Ces législatives et locales sont le miroir de ce que nous, Gabonais, sommes. »

La souveraineté du peuple sabotée

Les électeurs eux-mêmes ont tranché : le taux de participation a été historiquement bas, parfois inférieur à 20 % dans certains arrondissements. Cette abstention est un cri. Celui d’un peuple qui ne croit plus au vote, qui ne croit plus à ses institutions, qui ne croit plus à ses élites.

Pire : ceux qui contestent, ceux qui osent dire la vérité des urnes, sont menacés, marginalisés ou couverts de silence. La panthère que l’on a nourrie, pour reprendre les mots de Pacceli Bikoro, dévore désormais ses propres enfants.

Pour une salubrité républicaine : poursuivre et exclure

Il ne suffit plus de s’indigner. Il faut agir. Politiquement, juridiquement, moralement. Il faut désigner les fraudeurs, les poursuivre, les traduire en justice, les déclarer inéligibles.

Pas une simple réforme, pas un énième dialogue. Une épuration morale. Une mise à jour de notre classe politique.Une volonté ferme de refonder les institutions sur la base de la vérité, pas du faux.

Qu’on cesse de couvrir les voleurs d’élections. Qu’on arrête de dire que « tout le monde a triché ». Qu’on nomme les fautifs, et qu’on leur retire le droit de se présenter à toute élection. C’est cela, restaurer la souveraineté du peuple.

Pas de nouvelle République sans vérité des urnes ! 

La Vᵉ République ne peut naître d’un mensonge. Elle ne peut se construire sur des simulacres électoraux, des combines d’appareil, des renoncements en série. Elle ne peut se permettre de trahir à ce point les espoirs du 30 août 2023.

À défaut, comme le dit Éric Joël Bekale, il ne restera qu’une chose à dire : « Ah les élections au Gabon… avant = aujourd’hui = demain… c’est vraiment compliqué. » Sauf si, pour une fois, la justice passe. Sauf si, pour une fois, le Président de la République tranche, et redonne au mot élection sa dignité perdue.

Morel Mondjo Mouega

Titulaire d'une Licence en droit, l'écriture et la lecture sont une passion que je mets au quotidien au profit des rédactions de Gabon Media Time depuis son lancement le 4 juillet 2016 et de GMTme depuis septembre 2019. Rédacteur en chef

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