Diplomatie: Ellen Thorburn rassure sur les bonnes relations entre le Gabon et les Etats-unis
Interviewée par la rédaction de Gabon Media Time le jeudi 30 mars dernier, l’actuelle chargée d’affaires de l’ambassade des Etats-unis au Gabon Ellen Thorburn, en poste depuis le 27 octobre 2022, revient longuement sur les relations bilatérales entre les deux pays, notamment sur les plans diplomatique, économique et militaire. Ci-dessous l’intégralité de notre échange avec la diplomate.
Gabon Media Time: Quel est l’état actuel des relations entre les États-Unis et le Gabon ?
Ellen Thorburn : Tout d’abord, je suis ravie d’être avec vous aujourd’hui. Merci beaucoup de m’avoir invitée.
En réponse à votre question, je commencerai par rappeler que les États-Unis et le Gabon sont amis de longue date. Nos pays entretiennent d’excellentes relations et nous collaborons étroitement dans de nombreux domaines.
Après le grand succès du One Forest Summit, je voudrais souligner notre excellente coopération dans le domaine de l’environnement. D’ailleurs, nous félicitons le Gabon pour son leadership dans la lutte contre le changement climatique en tant qu’absorbeur net de dioxyde de carbone. Nous reconnaissons également les efforts que vous déployez pour promouvoir la sécurité maritime et pour mettre fin au commerce illégal d’espèces sauvages et de bois.
D’autre part, les gouvernements américain et gabonais collaborent étroitement à la protection de l’écosystème forestier unique du Gabon, principalement à travers le Programme régional pour l’environnement en Afrique centrale de l’Agence des États-Unis pour le développement international ou USAID, présente au Gabon depuis 1995. Pour ceux qui ne savent pas, l’ USAID est une agence indépendante du gouvernement fédéral américain chargée de gérer l’aide à l’étranger et l’assistance au développement.
Le Service de la Pêche et de la Faune Sauvage (U.S. Fish & Wildlife Service), depuis de nombreuses années, accorde des financements à l’Agence nationale des parcs nationaux du Gabon (ANPN) pour protéger l’environnement et sa riche biodiversité. Ces subventions ont permis au Gabon de soutenir l’implication des communautés dans la conservation, de créer les nouvelles zones marines protégées et de lutter contre le braconnage.
Le Service forestier des États-Unis, pour sa part, contribue à la lutte contre les activités forestières illégales à travers des programmes de renforcement des capacités tels que la formation de procureurs, de juges et d’enquêteurs. Et puis, le Service forestier fournit une assistance technique ciblée au Conseil national du climat du Gabon pour mesurer et surveiller le carbone forestier et soutenir le développement d’un plan national d’utilisation des terres pour appuyer la stratégie de développement à faibles émissions.
Je voudrais également souligner le leadership du Gabon en matière de paix et de sécurité. En tant que membre du Conseil de sécurité des Nations unies, le Gabon joue un rôle important dans la promotion de la paix et de la sécurité en Afrique et dans le monde. Nous sommes heureux de travailler avec le Gabon pour défendre le droit international et les principes de la Charte des Nations unies.
De plus, les États-Unis et le Gabon travaillent ensemble en matière de sécurité et de défense. Cette coopération concerne l’instruction militaire et les opportunités de formation qui renforcent les capacités des membres des forces armées gabonaises. Toutefois, nous aimerions augmenter notre collaboration dans ce domaine car nous pensons que, non seulement cela profitera à l’armée gabonaise, mais aussi que cela contribuera à renforcer la paix et la sécurité dans la région.
Nous sommes particulièrement satisfaits des récentes visites du commandant du Commandement des États-Unis pour l’Afrique, le général Michael Langley, et du commandant du Commandement des opérations spéciales des États-Unis pour l’Afrique, le contre-amiral Milton Sands. Sans oublier la visite de la Sous-Secrétaire d’État Adjoint, Madame Amy Holman, qui était la tête de notre délégation au One Forest Summit.
Par ailleurs, nous avons reçu, la semaine dernière, le Représentant Spécial des États-Unis aux Affaires Économiques et Commerciales, Monsieur Syed, qui a rencontré plusieurs ministres du gouvernement ainsi que des entrepreneurs gabonais dynamiques et a participé à une discussion intéressante avec la branche gabonaise du Programme d’entrepreneuriat des femmes africaines (AWEP). Sa visite avait pour but de promouvoir les investissements américains et explorer les opportunités d’affaires pour les entreprises américaines au Gabon.
A ce moment, une équipe USAID/CDC travaille avec l’OMS et le ministère de la santé pour faire face à l’épidémie du virus Marburg.
Quels sont vos principaux objectifs en tant que Chargée d’affaires ?
Mes objectifs principaux sont les suivants :
– soutenir les initiatives environnementales du Gabon,
– promouvoir la paix et la sécurité régionales,
– promouvoir la prospérité économique,
– approfondir les liens entre les peuples des États-Unis et ceux du Gabon.
Comment pensez-vous atteindre ces objectifs ?
Eh bien, je tiens à renforcer encore plus l’amitié entre le peuple gabonais et le peuple américain. Les États-Unis sont un partenaire solide du Gabon depuis son indépendance et nous souhaitons élargir notre partenariat avec vous.
L’un des meilleurs moyens d’y parvenir est de multiplier les contacts directs entre les Américains et les Gabonais. Par exemple, chaque année des programmes d’échange organisés par le gouvernement américain, tels que YALI Mandela Fellowship et l’International Visitor Leadership Program (IVLP), permettent à de futurs leaders gabonais de se rendre aux États-Unis pour une immersion en milieu professionnel et pour nouer des contacts avec des Américains qui sont actifs dans leurs domaines, afin d’établir des relations professionnelles et personnelles. De plus, nous finançons des American Corners à Libreville et Port-Gentil où les Gabonais peuvent apprendre l’anglais et décourvir la culture américaine. Nous offrons des ressources aux étudiants qui désirent aller étudier aux États-Unis et nous fournissons régulièrement des formations aux journalistes.
Nous aimerions également contribuer au développement durable du Gabon. Les États-Unis offrent un modèle de partenariat qui apporte l’investissement au Gabon et aux Gabonais. Nous travaillons dur à l’augmentation des échanges et des investissements entre nos deux pays.
Aujourd’hui, les États-Unis soutiennent des projets de coopération dans les domaines de l’environnement et de la sécurité à travers des programmes financés par le Département d’État, l’USAID, l’U.S. Fish & Wildlife, le Service forestier et le Département de la Défense. Cependant, nous aimerions augmenter notre apport dans ces domaines et offrir plus d’aide dans d’autres domaines tels que la santé, les droits de l’Homme et la justice. A cet effet, nous travaillons sur plusieurs accords bilatéraux pour fournir le cadre juridique qui permettra au gouvernement américain d’offrir une plus grande assistance pour des résultats mutuellement bénéfiques.
La volonté existe de part et d’autre. Nous souhaitons renforcer nos liens. Comme je l’ai déjà dit, les accords fournissent le cadre juridique qui permettra à cette aide d’arriver au Gabon.
Que pouvez-vous dire de plus sur ces accords bilatéraux entre les Etats-Unis et le Gabon ? Quelles sont les prochaines étapes de la mise en œuvre desdits accords en tant que chargée d’affaires ?
Premièrement, l’accord-cadre bilatéral de l’USAID est nécessaire pour développer l’aide étrangère des États-Unis en faveur des objectifs du Gabon. Il permettra à l’USAID d’étendre ses activités dans le domaine environnemental et de fournir une assistance dans d’autres domaines, notamment celui de la santé, très important compte tenu de la récente épidémie du virus Marburg en Guinée Équatoriale. Nous travaillons avec les ministères concernés pour finaliser cet accord.
Ensuite, il existe également des accords de coopération avec l’U.S. Fish & Wildlife et le Service forestier qui permettront de renforcer la coopération bilatérale en vue de promouvoir et de protéger la biodiversité et les forêts du Gabon.
Enfin, nous sommes en train de finaliser l’accord de coopération en matière de défense. Sa signature nous permettra d’élargir considérablement notre coopération déjà étroite dans ce domaine. Ainsi, nous pourrions plus facilement soutenir les efforts du Gabon dans la lutte contre la pêche illégale et la piraterie, par exemple. La signature de cet accord est l’une de nos priorités, car elle démontre notre engagement sincère en faveur d’une coopération bilatérale continue en matière de sécurité.
Que prévoyez-vous dans les 6 à 12 prochains mois ?
Je suis très heureuse que le Président Biden ait annoncé le 27 février, la nomination de Madame Vernelle FitzPatrick comme Ambassadeur des États-Unis au Gabon. Nous espérons que ces accords auront été signés et seraient implémentés avant son arrivée. Ces accords bilatéraux permettraient de renforcer la coopération dans les domaines du climat, de la santé, du commerce, de l’agriculture, de l’État de droit, de la défense et de la sécurité.
Quels ont été les résultats du récent Sommet États-Unis-Afrique qui s’est tenu du 13 au 15 décembre 2022 entre les chefs d’États et de Gouvernements américains et africains ?
Le Sommet des dirigeants américains et africains tenu à Washington a clairement indiqué que l’avenir est africain. Comme l’a fièrement déclaré le président Biden lors du sommet, « les États-Unis misent tout sur l’avenir de l’Afrique […] Lorsque l’Afrique réussit, les États-Unis réussissent et, très franchement, le monde entier réussit ». En signe de cet engagement, le Vice-Président Harris se rendra en Afrique ce mois-ci, tout comme le Secrétaire d’État Blinken.
Au-delà de l’aspect sécuritaire, il y a eu l’économie, avec le US-Africa business forum qui s’est déroulé en parallèle du sommet politique. Concrètement, que peuvent espérer les pays africains ?
L’intégration de l’Afrique dans les marchés mondiaux, le boom démographique et l’esprit d’entreprise et d’innovation à l’échelle du continent offrent aux États-Unis une occasion extraordinaire d’investir dans l’avenir de l’Afrique. Les États-Unis soutiendront et faciliteront la mobilisation de capitaux privés pour stimuler la croissance économique, la création d’emplois et une plus grande participation des États-Unis à l’avenir de l’Afrique.
Le président Biden a annoncé en décembre, lors du US-Africa Business Forum, plus de 15 milliards de dollars d’engagements, d’accords et de partenariats bilatéraux en matière de commerce et d’investissement pour faire progresser les grandes priorités, notamment l’énergie durable, les systèmes de santé, l’agro-industrie, les connexions numériques, les infrastructures et la finance.
Pouvez-vous dresser un bilan des relations entre l’Afrique et les États-Unis ?
Les relations entre l’Afrique et les États-Unis sont solides. Lors du récent sommet États-Unis-Afrique, le président Biden a réaffirmé l’engagement des États-Unis à travailler avec les Africains pour trouver des solutions concrètes et durables. La preuve de notre fort engagement est que nous avons des ambassades dans presque tous les pays sur le continent.