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Contribution au développement de la filière poulet de chair : actions prioritaires pour la période novembre 2025-décembre 2026

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Le Gabon importe près de 60 000 tonnes/an de viande de poulet de chair (PC) pour une production locale qui frôle à peine les 4 000 tonnes. Cette situation a poussé le Président de la République, Chef de l’Etat, Chef du Gouvernement son Excellence Brice Clotaire OLIGUI NGUEMA, à prendre une décision courageuse et salutaire en décidant de l’arrêt des importations des PC dès le 1er janvier 2027.

Cette décision entre dans le cadre de la politique de renforcement de l’autosuffisance alimentaire et de la dynamisation de la filière avicole. Elle renforçe la souveraineté économique par la maitrise de la production de PC par les gabonais. Passer de la décision politique à l’impact concret exige une mobilisation immédiate, organisée et coordonnée de l’ensemble des acteurs impliqués. Chaque institution, chaque partenaire technique et financier, chaque opérateur économique doit se mettre en ordre de bataille, non pas en simple exécutant, mais en un véritable artisan du changement. Aussi, depuis l’annonce officielle de cette décision par le conseil des ministres du 30 mai 2025, plusieurs actions ont été menées par le Ministère de l’agriculture, de l’élevage et du développement rural.

Par ailleurs, le recensement des aviculteurs a constitué une étape importante pour identifier précisément les acteurs engagés impliquées dans cette filière avicole au Gabon. Cette démarche a été suivi par la tenue des assises du Forum Nationale sur le Poulet de Chair, offrant un cadre de concertation essentiel pour l’ensemble des aviculteurs et autres acteurs impliqué dans la chaine de valeur avicole. A l’issue de ces travaux, les professionnels du secteur ont co-construit une feuille de route concertée, traçant ainsi les base d’un développement structuré et durable de cette filière.

En plus, de ces actions nous avons vu la présentation au Chef de l’Etat d’un projet d’envergure sur la mise en place de six (6) fermes intégrées pour la production de poulets de chair dans notre pays. Dans cet élan, le groupe AVOS (SMGA), qui est l’un des acteurs majeurs de la filière et spécialisé dans la production de poussin d’un jour et d’aliment de bétail, s’organise également pour rehausser sa production d’aliment pour atteindre 35 000 tonnes d’aliment et 3,2 millions de poussins par année.

Toutes ces actions méritoires s’inscrivent dans la mise en œuvre de la vision du Président de la République pour le développement de la filière avicole. Cependant, une question primordiale se pose quant à leur réel impact sur la production nationale à l’horizon 2026 : passerons-nous de 4000 tonnes à 8000 tonnes ; ou alors de 4000 à 55 000 tonnes de viande de poulet ? Par ailleurs, si au 2 janvier 2027, la production locale reste à 4000 tonnes alors que 55 000 tonnes ne seront plus importées, quel sera l’impact sur les prix et l’accès des ménages à ce produit ? ne risquons-nous pas de déclencher une inflation importante résultant de la loi économique de l’offre et la demande ? Pour produire 55 000 tonnes de PC en à peine un an, il faut produire 158 000 tonnes d’aliment.

Localement le poulet de Chair PAC pèse entre 1,1 et 1,2 kg, il faudrait donc produire la même année près de 46 millions de poussins d’un jour. Est-ce que les conditions actuelles du Gabon permettent d’atteindre cet objectif en 2026 ? Sans être défaitiste, nous restons convaincus que cet objectif ambitieux est atteignable en donnant le temps aux aviculteurs le temps nécessaire matérialiser cette vision. Les 14 mois qui restent d’ici à  décembre 2026 constituent une fenêtre d’action stratégique pour atténuer les effets de la loi de l’offre et de la demande sur le panier de la ménagère. En effet, en capitalisant sur l’existant et en accélérant certaines actions ciblées notamment avec des souches à croissance rapide dont le cycle de production est de 45 jours, il est possible d’accroitre significativement la production locale de poulet de chair. Signalons que le but est de compléter les efforts déjà faits par le gouvernement.

Dans ce cadre, le Programme de Production et de Santé Animale de l’Institut de Recherches Agronomiques et Forestières (IRAF) a formulé des propositions concrètes, issues de ses activités (ou travaux) de recherche, pour contribuer efficacement à la matérialisation de la vision portée par le Chef de l’Etat.

Nous proposons de mobiliser en premier les éleveurs actifs dans la filière avicole en particulier les éleveurs de poulets de chair ; avec pour objectif de doubler voire tripler la production actuelle du pays avant janvier 2027. Cette approche progressive et réaliste permettrait de faire passer la production de 4000 tonnes actuellement à près de 8000 ou 12000 tonnes de poulets de chair, soit une avancée significative bien qu’insuffisante au regard de l’objectif ultime des de 55000 tonnes.

Pour l’atteinte de ces résultats, nous suggérons la mise en œuvre de 7 actions prioritaires suivantes : (1) Recenser et cartographier les éleveurs de pc : Identifier précisément tous les éleveurs de poulets de chair qui sont en activité. Faire un travail de géolocalisation pour facilement les retrouver, le cas échéant. Cette identification permettra une traçabilité des poulets abattus et destiné à la vente sur le marché local. Ce travail a déjà commencé avec le Ministère de l’Agriculture et reste à affiner la géolocalisation. (2)

Diagnostiquer les exploitations de pc : Pour mieux les accompagner, un diagnostic de chaque exploitation sera fait pour comprendre les points de blocage (finance, poussin d’un jour, aliment, produits vétérinaires, formation etc.), qui empêchent d’augmenter la production. Une fois ces points identifiés, il faudra y apporter des solutions spécifiques pour permettre d’augmenter la production. (3)

Faciliter l’accès aux intrants et produits vétérinaires : Les intrants d’élevage ne sont pas toujours accessibles à moindre coût. Des facilités devraient être mise en œuvre pour accélérer l’accès à l’importation en plus de l’exonération douanière qui existe déjà. Pour les poussins d’un jour, le fournisseur local pourrait être encouragé à augmenter et améliorer cette production actuelle. Pour l’aliment, il faudrait faciliter l’importation en attendant de mettre en place une filière de production locale d’aliment de volaille. De plus pour l’alimentation, il faut s’assurer que les coûts de production des ingrédients (maïs, soja, etc.) permettent d’avoir un aliment qui impacte le coût de production du kg de poulet. Pour les produits vétérinaires, il faut encourager la diversification et l’importation à partir des structures étrangères spécialisées et mettre en place une structure de contrôle des produits vétérinaires importés.

Encadrer techniquement les producteurs : Mettre en place un programme de suivi encadrement des producteurs de PC pour assurer les résultats et la pérennité des exploitations.

Structurer et financer les exploitations : Encourager les producteurs déjà en activité à structurer leurs exploitations en entreprises et faciliter leur accès au crédit bancaire à des taux préférentiels comme avec la Banque pour le Commerce et Entrepreneuriat du Gabon (BCEG).

Structurer les producteurs en coopératives : Organiser les producteurs en coopératives pour mutualiser les ressources et optimiser la commercialisation. Promouvoir la marque « Made in Gabon » pour le PC et encourager les institutions nationales à commander le poulet local. Par exemple l’intendance de la Présidence de la République, de la Vice-présidence, la vice-présidence du gouvernement et ainsi de suite. Mettre en place des unités d’abattage : Des unités d’abattage pourraient être mises en place dans des zones géographiques regroupant plusieurs éleveurs, sous le contrôle vétérinaire.

En conclusion, nous estimons que la mise en œuvre des actions proposées, permettrait au Gabon d’augmenter significativement sa production de poulet de chair, en passant de 4000 tonnes à 8000 voire 12000 tonnes d’ici décembre 2026. Cet objectif, bien que modeste au regard des ambitions nationales, constituerait une avancée concrète et réaliste vers l’autosuffisance. Le but ici est d’amorcer une inversion de la courbe des importations de poulet de chair dès fin décembre 2026, tout en poursuivant la mise en œuvre du Programme de Production de Poulet de Chair à l’échelle national porté par les plus hautes autorités, sous l’impulsion de Son Excellence le Chef de l’Etat.

Dr Patrick BYAMBAS

Chargé de Recherches CAMES

Chercheur à l’IRAF

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