Candidature d’Oligui Nguema : finalement une transition vers…lui-même ?

Le 30 août 2023, le Gabon tournait une page de son histoire. Un coup d’État mettait fin à 56 ans de pouvoir de la famille Bongo. Brice Clotaire Oligui Nguema, alors chef de la Garde républicaine, promettait une transition exemplaire, une refondation des institutions, et surtout… des élections libres.

Mais aujourd’hui, celui qui devait arbitrer le retour à l’ordre constitutionnel est finalement candidat. Alors, cette transition était-elle une passerelle… ou une rampe de lancement pour lui-même ?

Dès son arrivée, Oligui Nguema a imposé un style direct, affichant une volonté de rupture avec l’ancien régime. Un discours rassurant, des annonces chocs : lutte contre la corruption, retour des bourses scolaires, nationalisation d’entreprises stratégiques. Très vite, un mot revient : bâtisseur.

Mais derrière ce dynamisme, une question se pose : toutes ces réformes étaient-elles un acte de gouvernance… ou les premiers jalons d’une campagne électorale ? Le Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) a mené plusieurs réformes clés, notamment une nouvelle Constitution et un Code électoral remanié. Officiellement, pour garantir un scrutin transparent.

Mais quand on y regarde de plus près, les nouvelles règles semblent surtout taillées pour un candidat bien précis. un président peut être élu dès le premier tour s’il obtient 50% des suffrages. Ce qui favorise… le candidat le plus visible. Or, qui est le plus visible depuis 18 mois ?

Autre élément : la structuration du paysage politique. L’opposition, qui espérait une véritable transition, s’est retrouvée face à un pouvoir qui a verrouillé le jeu. L’absence de réformes profondes sur le financement des partis ou l’accès équitable aux médias publics a maintenu une asymétrie. Oligui Nguema, en chef de l’État, a pu multiplier les tournées à travers le pays, renforcer son image, quand d’autres peinent encore à faire campagne.

Et l’opposition dans tout ça ?

Face à lui, l’opposition peine à émerger. D’abord, elle a été surprise par un calendrier électoral accéléré. Ensuite, elle évolue dans un environnement où l’appareil d’État – de l’administration aux médias – reste largement contrôlé par le CTRI.

Difficile de mener campagne à armes égales quand son principal adversaire a dirigé le pays pendant un an et demi, avec les leviers du pouvoir entre les mains.

Alors, Brice Clotaire Oligui Nguema peut-il vraiment être un candidat comme les autres ? D’un point de vue strictement légal, oui. Mais politiquement, la question reste ouverte.

Car cette élection n’est pas seulement un vote, c’est un test pour la démocratie gabonaise. Si Oligui Nguema l’emporte, ce sera une victoire électorale… ou la confirmation que la transition n’a fait que tracer un chemin tout droit… vers lui-même.