Budget 2024 : 102 milliards d’annulation de crédits en violation de la loi
Le Rapport sur l’exécution des lois de finances relatif au règlement du budget 2024, produit par la Cour des comptes, dresse un constat particulièrement sévère de la gestion budgétaire de l’État. Sous-estimation du niveau réel de la dette, détournement d’objectifs, manque de transparence, mais surtout annulations de crédits opérées en contradiction avec la loi organique, le document met en lumière d’importantes irrégularités. Ces pratiques exposent le budget de l’État à un défaut de sincérité et révèlent des défaillances dans la maîtrise des crédits engagés au cours de l’exercice 2024. La Cour exige ainsi des clarifications immédiates, notamment concernant les écarts entre les montants déclarés et ceux effectivement exécutés.
Au cœur de ses observations, la Cour rappelle que l’article 47 de la loi organique n°20/2014 relative aux lois de finances fixe clairement un plafond à l’annulation des crédits « un crédit doit être annulé lorsqu’il est devenu sans objet et le montant cumulé des crédits annulés ne peut dépasser 1,5 % des crédits ouverts par la loi de finances de l’année ». Or, pour 2024, les crédits non consommés en biens et services atteignent 64,07 milliards de FCFA, soit 2,47 % du budget, dépassant déjà le seuil légal. S’y ajoutent 38,43 milliards de FCFA de crédits d’investissement non exécutés, portant le total des annulations prévues à 102,5 milliards de FCFA, soit 3,95 % du budget, près de trois fois la limite autorisée.
Des annulations contraires aux règles budgétaires
La Cour souligne que les crédits d’investissement n’auraient pas dû être proposés en annulation mais en report, conformément à l’article 48 alinéa 3 de la LOLFEB qui précise que seuls les crédits de paiement relatifs aux investissements en cours peuvent être reportés, dans la limite des autorisations d’engagement effectivement utilisées mais non encore payées. Les magistrats estiment que les 38,02 milliards de FCFA correspondant aux programmes en cours auraient dû faire l’objet d’un report, afin d’assurer la continuité des actions engagées. En allant à l’encontre de ce principe, l’administration budgétaire a contrevenu aux règles fondamentales d’annualité et de spécialité des crédits, remettant en cause la régularité de l’exécution du budget 2024.
Plus préoccupant encore, la Cour révèle l’absence totale des arrêtés de non-consommation des crédits, documents pourtant obligatoires pour toute annulation. L’article 48 est explicite « l’annulation de crédits est décidée par arrêté du Premier ministre sur proposition du ministre chargé du Budget et du ministre concerné ». Aucun arrêté n’a été produit pour justifier les annulations effectuées, rendant celles-ci juridiquement irrégulières. Face à ces manquements graves, la Cour exige de la DGBFiP la production immédiate des arrêtés d’annulation. Elle demande enfin à la DGBFiP d’expliquer l’absence de ces pièces essentielles, condition indispensable à la transparence et à la sincérité des comptes de l’État.









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