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Affaire Opiangah : la justice gabonaise prise dans le piège d’une instrumentalisation flagrante

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L’affaire Hervé Patrick Opiangah, plus que jamais révélatrice des dérives du système judiciaire gabonais, semble s’enliser dans une mascarade procédurale qui met à mal les principes fondamentaux de l’État de droit. Alors que le dossier est vide, sans victime, sans preuve et sans infraction constituée, les magistrats en charge du dossier continuent de tergiverser, exposant ainsi une justice aux ordres. Jusqu’à quand la justice gabonaise acceptera-t-elle d’être instrumentalisée à des fins politiques individuelles ?

Un dossier vide, une justice en contradiction avec elle-même. Depuis plusieurs mois, les avocats d’Opiangah ne cessent de démontrer l’inconsistance du dossier, pointant notamment l’absence totale d’éléments matériels justifiant une enquête. L’accusation, d’abord fondée sur une plainte dont la date a été manipulée, s’est ensuite heurtée à un obstacle majeur : la principale victime supposée, Elisabeth Menghe Opiangah, a non seulement rejeté toutes les allégations mais a aussi déposé une plainte contre son oncle pour diffamation.

« Dès l’instant où la principale victime, qui est censée être au centre de cette affaire, rejette toutes allégations mensongères sur son père, il est impératif de mettre fin à cette mascarade judiciaire », s’indigne un citoyen gabonais sur le forum Edifice Commun, rassemblant plus de 1000 membres de différentes catégories socio-professionnelles.

Malgré cela, la justice gabonaise persiste à maintenir une procédure arbitraire, ignorant délibérément les principes élémentaires du droit pénal. Le non-lieu, demandé par les avocats d’Opiangah, aurait dû être une simple formalité. Pourtant, la Doyenne des juges d’instruction l’a rejeté au motif absurde de l’absence de présentation de l’accusé, une justification qui ne repose sur aucun fondement juridique sérieux.

Un enlisement judiciaire organisé pour des raisons politiques

Ce qui frappe dans cette affaire, ce n’est pas seulement l’inconsistance du dossier, mais aussi les lenteurs suspectes qui retardent volontairement la procédure. Depuis plus d’un mois, la Chambre d’accusation, saisie après l’appel des avocats, n’a toujours pas reçu le dossier, qui semble volontairement bloqué au niveau du Procureur général. « À cette allure, quel crédit accorder à une justice aux ordres, qui foule aux pieds les principes fondamentaux du droit ? », s’interroge un magistrat.

Ce dernier va plus loin en dénonçant un véritable scandale judiciaire. « Dès lors que le Procureur de la République a été pris en flagrant délit de mensonge sur les dates de dépôt de plainte, et que l’absence d’infraction a été démontrée, la seule décision légale possible est le non-lieu. Mais ce que nous voyons ici, c’est un véritable complot politique déguisé en procédure judiciaire », a-t-il martelé. 

La justice gabonaise face à son propre discrédit

Dans cette affaire où le droit semble céder le pas aux intérêts politiques, la responsabilité du Procureur général Eddy Minang est désormais engagée. Prononcer un non-lieu immédiat serait non seulement un acte de justice, mais aussi un signal fort envoyé à une opinion publique qui observe avec scepticisme l’évolution de ce dossier. À l’inverse, prolonger l’acharnement judiciaire contre Hervé Patrick Opiangah reviendrait à consacrer une instrumentalisation de la justice, alimentant ainsi le sentiment d’injustice et de défiance envers les institutions. 

En refusant de céder à la pression politique, le Procureur général a l’opportunité de restaurer un semblant de crédibilité à une justice gabonaise de plus en plus perçue comme un outil de règlements de comptes. À ce tournant décisif, l’histoire retiendra s’il a choisi de servir la loi ou de se soumettre aux jeux d’influence.

Alors que la campagne électorale approche, cette affaire ne peut être dissociée du contexte politique actuel. Si l’on veut éviter que le Gabon ne s’enfonce dans une crise institutionnelle plus grave, il devient urgent pour les magistrats en charge de ce dossier de retrouver leur indépendance et de statuer en toute impartialité.

Le Gabon, en quête d’un véritable État de droit, peut-il encore tolérer une justice aux ordres ? Cette affaire est un test crucial pour l’indépendance judiciaire, qui doit trancher selon la loi et non sous pression politique. Le maintien de cette parodie judiciaire entamerait davantage la confiance des citoyens envers les institutions. Un non-lieu s’impose comme la seule issue crédible. Les jours à venir détermineront si la justice gabonaise choisit l’équité ou la soumission.

Henriette Lembet

Journaliste Le temps est une donnée fatale à laquelle rien ne résiste...

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