Mise sous bon de caisse des fonctionnaires: les forces de sécurité privilégiées de la République ?
A quelques jours du lancement de l’opération de mise sous bon de caisse des fonctionnaires l’opinion reste toujours dubitative quant à la volonté réelle du gouvernement de réduire considérablement sa masse salariale. Lors de la conférence de presse qu’il a animé ce jeudi 12 juillet le ministre de la Fonction publique, de la modernisation du service public chargé de la réforme de l’Etat, Ali Akbar Onanga Y’Obegue a révélé que certains agents de l’Etat seraient exemptés de cette opération.
En effet, lors de cette rencontre avec la presse nationale et internationale, le membre du gouvernement a annoncé que l’opération de mise sous bon de caisse des agents publics, qui permettra à terme de faire un recensement de ces derniers, se déroulera du 17 au 24 Juillet 2018 de 8h à 17h. Dans le même temps, il a précisé que la première phase de la mise sous bon de caisse ne concernait que les «agents publics exerçant dans la province de l’Estuaire soit environ 50 000 fonctionnaires». Étant entendu qu’en sont exclus «les agents des forces de défense et de sécurité et la sécurité pénitentiaire».
Une exception qui au sein de l’opinion suscite des interrogations, certains y voyant une sorte de privilège offerte grassement par le gouvernement à des personnels dont la mission n’impacte que très peu les populations, notamment sur le plan sécuritaire. D’ailleurs, le dernier classement de l’organisme Global Fire Power qui classe le Gabon au 28ème rang continental et 126ème puissance militaire en Afrique conforte l’idée selon laquelle les forces de défense et de sécurité gabonaise demeurent très actives.
Pis, l’incompréhension est d’autant plus grande quand on sait que sur le plan budgétaire, les départements de la défense et de l’intérieur bénéficient d’une masse salariale très importante. Avec une masse salariale projetée de 166 milliards de Fcfa en 2016, pour un effectif de 27 109 agents, le ministère de la Défense nationale est présenté comme la première administration du pays. Avec 64 milliards de Fcfa, le ministère de l’Intérieur quant à lui, constitué principalement des forces de police nationale, était la 4ème en 2016 en termes de rémunération.
Selon l’analyste économique, Mays Mouissi, le ministère de la Défense, est le premier poste de dépense budgétaire de l’Etat en terme de masse salariale, et il est aussi celui qui a enregistré la plus forte progression en terme de dépenses salariales de l’Etat entre 2008 et 2016.
Son poids dans le budget est passé de 19% à 23% (+4%). Vient ensuite le ministère de l’intérieur dont le poids dans les dépenses salariales de l’Etat a progressé de 3% sur la même période. Au moment où s’ouvre donc la mise sous bon de caisse d’aucun se demande désormais pourquoi exclure ces personnels de la mesure si l’objectif est bien entendu de réduire la masse salariale? Le port d’armes ne fait-il pas des policiers, gendarmes, militaires et gardes pénitentiaires des privilégiés ? Poser la question c’est y répondre.