Justice : arrestation de Loïc Ntoutoume, mesure de police d’audience ou excès de zèle ?
L’audience qui s’est tenue ce mercredi 3 août 2016 à la Cour d’appel de Libreville a été le théâtre d’un curieux évènement avec l’arrestation du journaliste Loïc Ntoutoume du site d’actualité www.gabonreview.com.
En plein débat, le premier président de la Cour d’appel de Libreville, Madame Paulette Ayo-Mba a étonné l’assistance en sommant les agents présents dans la salle d’appréhender un monsieur ayant une cravate rouge.
Surpris avec son téléphone en main, notre confrère a été conduit devant la présidente de la juridiction qui a demandé à ce que son sac soit saisi et fouillé, après vérification un appareil photographique a été trouvé dans le sac de ce dernier. Une situation qui suscite des interrogations au vue de la loi.
En effet, en matière d’audience au sein des juridictions judiciaires, l’article 346 du code de procédure dispose « Le président exerce la police de l’audience. Tout ce qu’il ordonne pour le maintien de l’ordre à l’audience est exécuté sur le champ. La même disposition est observée dans les lieux ou les magistrats et les greffiers exercent les fonctions de leur état ».
De plus, les faits reprochés à Loïc Ntoutoume semblent confus en ce sens que le texte poursuit « si un ou plusieurs individus, quels qu’ils soient, interrompent le silence, donnent des signes d’approbation ou d’improbation soit à la défense des parties soit au discours et ordres des magistrats, causent ou entretiennent du tumulte de quelque manière que ce soit, et si, après l’avertissement du président ils ne rentrent pas dans l’ordre, il sera enjoint de se retirer(…)»
Au demeurant notre confrère n’aurait reçu aucun avertissement de la première présidente de la cour comme le prévoit la loi, et même selon certains témoins présents, il assistait paisiblement à l’audience comme tout le monde. Le seul fait que Madame Ayo-Mba lui reproche serait semble-t-il d’avoir été en possession d’un appareil photographique pourtant ‘’ranger dans son sac’’.
Il faudrait rappeler, par ailleurs à madame la première présidente de la Cour d’appel de Libreville que « si un crime ou un délit est commis à l’audience, le président agit conformément aux dispositions du code de procédure pénale. Si le fait commis ne constitue qu’une contravention, le président applique séance tenante les peines de simple police » (art. 348, al 3).
En l’espèce, Loïc Ntoutoume qui a finalement été libéré dans la soirée, n’avait commis aucun crime ou délit, et même au-delà aucune contravention dûment vérifiée, il ne pouvait pas être interpellé comme un vulgaire délinquant qui soit disant aurait troublé le bon déroulement de l’audience. Et pour aller plus loin, le code de procédure civile étant muet sur les différents faits qui peuvent constituer une contravention lors d’une audience, il est incompréhensible que la cour ait eu à procéder à l’arrestation séance tenante du journaliste, qui nul été son statut croupirait sûrement en garde à vue à la BSP ou serait déféré à la prison centrale.