Gabon : le gouvernement légalise l’avortement

L’avortement, ce fait de société devenu un problème de moralité publique, a fait l’objet d’une avancée significative de son texte d’incrimination, par le législateur à travers l’érection du nouveau Code pénal. Désormais, l’interruption volontaire de la grossesse est autorisée au Gabon à condition de remplir l’une des exigences posées par le législateur.
La loi n°042/2018 du 5 juillet 2019 portant Code pénal vient à travers un certain nombre de dispositions de légiférer sur l’avortement, un acte répandu dans la société gabonaise mais faisant souvent l’objet d’une pratique clandestine, alliant procédés insolites et méthodes rudimentaires. Certaines femmes ont redoublé de génie en inventant diverses recettes dans le but d’interrompre les grossesses qu’elles ont contractées.
Conscient de l’impérieuse nécessité d’encadrer cette pratique qui tend à déprécier nos valeurs sociétales, le législateur par le truchement de deux dispositions, a légalisé l’avortement effectué dans un cadre strict prévu par le Code pénal et réprimé sévèrement celle pratiqué de façon illégale.
En cette occurrence, l’article 377 du nouveau Code pénal, nous enseigne qu’ « est punie d’un emprisonnement de deux ans au plus et d’une amende de 1.000 000 plus, ou de l’une de ces deux peines, la femme qui s’est procurée l’avortement à elle-même qui a tenté de se le procurer ou qui a consenti à faire usage des moyens à elle indiqués ou administrés à cet effet ».
Par la présente disposition, le législateur sanctionne les personnes qui s’adonnent à l’interruption de grossesse clandestine en faisant usage des méthodes artisanales en ingurgitant soit des potions ou en introduisant des mixtures non réglementées.
L’avancée majeure de cette légalisation reste l’apport ou du moins l’ajout par le législateur, de la possibilité d’interrompre sa grossesse sans courir le risque de faire l’objet des poursuites pénales par le ministère public à condition de respecter les exceptions énumérées par l’alinéa 2, premièrement, deuxièmement et troisièmement de l’article 377 du code pénal.
Le législateur autorise ainsi l’interruption thérapeutique de grossesse « lorsqu’il a été prouvé que l’enfant conçu naîtra avec des malformations physiques graves ou incurables, lorsque cette grossesse compromet gravement la vie de la mère et lorsque la conception a eu lieu par suite de viol, inceste ou lorsque la mineure se trouve dans un état de détresse grave ». L’État de détresse grave peut être assimilé ici à l’incapacité ou l’impossibilité pour la mineure de s’occuper de sa grossesse et de l’enfant à naître.
Dit autrement, la législature octroie la liberté à chaque femme se trouvant dans l’une des conditions susmentionnées de procéder à l’avortement thérapeutique et non artisanale. Le législateur insiste sur le caractère thérapeutique, c’est-à-dire comme le prévoit l’article 378, dans « un délai de dix semaines, par un médecin et dans un établissement hospitalier ».
Par conséquent, toute personne même réunissant l’une des conditions énumérées à l’alinéa 2 premièrement, deuxièmement et troisièmement de l’article 377, interrompt sa grossesse sans tenir des préconisations de l’article 378 par un médecin agréé et dans un hôpital s’exposera à une peine d’emprisonnement de 2 ans et d’une amende de 1 million de F CFA.
Bien que saluant la volonté du Parlement de légaliser sous certaines conditions l’avortement, il n’en demeure pas moins que les dispositions du troisièmement de l’alinéa 2 de l’article 377, opèrent une rupture d’égalité entre les mineures et les femmes adultes. Ledit alinéa n’octroie qu’aux seules aux mineurs le droit à l’avortement en prenant appuie sur « l’état de détresse grave ».